La tristesse d'un homme en prise avec son destin est toujours une chose tragique et impressionnante. Mais le tragique est parfois dans la banalité.
C'est une situation toute simple. Un élève qui se rend compte à la vue de son bulletin qu'il paye à prix fort des copies non rendues ou des absences desquelles ils pensaient tirer un plaisir. Tel un couperet l'histoire le rattrape, il s'excuse et s'en excuse mais rien y fait. Il se rend maintenant compte de ce qu'il aurait dû ou voulu faire mais c'est trop tard. Il ronge son frein et se maudit lui-même alors qu'il ne devrait pas. Pour l'une des toutes premières fois il tâte son destin et se rend compte de la responsabilité des choses.
Mais il ne faudrait pas croire qu'un destin, même aussi insignifiant que celui d'un homme sans qualité, aussi banal qu'un simple étudiant dans une classe, est petit et étriqué ou tragique par sa petitesse et son insignifiance.
Non, le tragique vient aussi et surtout du monde qui l'entoure. Quand ce n'est pas des acteurs qui le peuplent.
Un employé jusque-là modèle qui doit quitte son poste pour suivre sa moitié qui d'un coup devient un bon à rien que l'on néglige ou que l'on brime simplement parce que le patron n'avait pas imaginé un instant que son employé était avant tout humain et passe sa colère comme le caprice d'un enfant à qui le monde ne convient pas.
Le tragique de l'existence d'un homme réside dans la banalité de son quotidien. C'est ce qui en fait la grandeur.
Mais lorsque le monde s'efforce de vouloir faire plier celui qui se contentait de le suivre et de l'animer, un retournement soudain parce que les foudres du capricieux doivent bien tomber quelque part, alors c'est à n'y plus rien comprendre. L'homme devient triste. Triste de ne pas comprendre ce prix exorbitant auquel on lui fait payer soudain la liberté de son existence. Il y a une injuste profonde là-dessous. Et la tristesse d'un homme en prise avec son destin est une chose tragique.
Pourquoi tous les hommes ne savent pas qu'ils en sont et que jouer aux dieux est aussi vain que pathétique? Restons humains.