mardi 20 avril 2010

La question du panoramique.

L'utilisation d'un matériel léger, d'une équipe restreinte et l'emploi d'une méthodologie non intrusive de tournage entraîne une qualité d'image inférieure à d'autres procédés. Il n'y a là aucun fatalisme et aucune cause de nécessité, c'est un simple constat.

Ne pas utiliser de trépied en toute circonstance augmente considérablement le risque d'une image flottante voire tremblante qui nuit à sa qualité perçue. Ne tourner qu'en “lumière directe" (comme en son direct) affecte également le grain ou la finesse de l'image et de son rendu. Une équipe restreinte à une seule et même personne accentue le côté bricolage du tournage et l'impossibilité de gérer l'ensemble des paramètres de manière aussi précise qu'avec une large équipe. Mais ces facteurs optimisent la discrétion, la réactivité et la spontanéité.

La qualité d'image en fait ne dépend pas tellement des moyens employés que de la manière de les employer. Évidemment cette remarque ne vaut que restreinte à un contexte particulier de production d'image, mais cela ne l'affecte en rien. Il est possible de faire de très bonne chose avec un matériel d'entrée de gamme et inversement rien de bon avec du haut de gamme. L'important est d'avoir un outil adapté à son usage.

L'une des difficultés que semble rencontrer la HD, surtout lorsqu'elle est utilisée sans pied, est le moirage dans les panoramiques. Le problème ne vient pas spécialement de la caméra, mais du manque d'unité dans le traitement de l'image entre le capteur lui-même et les diverses compressions aux différents stades de la production. Les sauts de pixels sont très désagréables et donnent de véritables migraines ophtalmiques. Cela peut-être réduit par un champ de course très lent mais cela ne fait que réduire le problème, ou bien de projeter en résolution supérieure au tournage ce qui se fait au détriment de la couleur.

Mais la question est peut-être ailleurs. Le panoramique est un procédé très particulier en soi car il est étranger à la vision normale humaine. Faites-en vous-mêmes l'expérience: combien de fois effectuez-vous dans une journée une vision panoramique? Si peu qu'il n'est pas faux de dire jamais. Lorsque nous déplaçons notre regard d'un point vers un autre soit nous le faisons de manière rapide en deux temps: point de départ/point d'arrivée avec un entre-deux durant lequel notre regard ne s'attache à rien et donc auquel nous ne portons pas attention, ce qui se traduit par une sorte de flou rapide plus sombre que les deux points d'encrage. Ou bien nous effectuons ce panoramique de manière beaucoup plus lente en atteignant le point d'arrivée par une succession de points intermédiaires sur lesquels se portent notre attention avec un changement de focale pour chacun de ces points. Mais jamais de panoramique sans point de départ ni d'arrivée ni de focus intermédiaires.

Le panoramique à donc deux raisons d'être: la première est d'aboutir à un point en partant d'un autre et par conséquent de montrer que l'un découle de l'autre comme un effet d'une cause. Ce procédé peut aisément être épuré et renforcé par un montage cut qui évite l'inconvénient du flou. Au pire par un fondu enchaîné mais qui complique un peu la compréhension de cette relation. La seconde raison d'être du panoramique est descriptive et montre une étendue composée d'éléments signifiants et de leurs rapports spatiaux. Il s'agit donc de montrer non pas un panoramique mais un panorama et en ce sens peut aisément et avantageusement être remplacé par une vue d'ensemble suffisamment longue pour que le regard du spectateur puisse l'explorer.

Ces deux procédés ont l'avantage de clarifier la lisibilité en évitant l'effet de moirage et de renforcer le mode de lecture analytique/descriptif avec pour seul inconvénient d'éviter tout effet superflu de caméra, ce qui n'est pas un défaut bien au contraire.

Si ces procédés ne sont pas possibles lors du tournage, en particulier s'il n'est pas possible de faire un plan d'ensemble par manque de recul, alors le panoramique peut éventuellement se justifier mais encore il serait préférable de le remplacer par une succession de point focal avec un montage approprié ou par un mouvement de caméra d'un point à un autre afin de mettre l'accent sur le mouvement du regard et non pas de la caméra, dans ces deux cas le trépied n'est pas nécessaire.

Cela implique que l'accent est toujours mis sur la lisibilité et la clarté et non pas sur quelconque prouesse de tournage ou de jeux superflus d'effets, je conçois donc que cela puisse d'avantage plaire à un tenant de l'image comme outils et non pas d'un cinéaste esthétisant. Les remarques qui précèdent doivent donc s'entendre dans ce cadre-là.

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