mercredi 20 février 2008

Lapalissade: la Révolution est une Révolution

“Politique" signifie, dans les cours de philosophie, “chose publique" par opposition à la “chose privée". “Chose publique" est ici à comprendre comme ce qui concerne tous les citoyens. Tout le monde n'est pas citoyen car tout le monde n'a pas le droit de prendre part à la chose publique de manière active. Un mineur par exemple est pris en charge par la chose publique mais n'en est pas acteur.

Avec la Révolution, la chose publique est devenue, en France, l'affaire du peuple et non plus seulement d'une élite et du dirigeant. Par le biais d'élections, le peuple délègue une partie de ses pouvoirs à certains chargés de le représenter et qui prennent des décisions au nom du peuple pour organiser la chose publique, c'est-à-dire pour que la vie en communauté soit possible et ce du mieux possible.

Avant la Révolution le peuple était passif; le terme “sujet" servant à désigner la population n'avait pas le sens qu'il a actuellement. “Sujet" s'oppose à “agent", est sujet celui qui porte un attribut, c'est-à-dire à qui quelque chose arrive. Ce n'est qu'au XVIIIe que le terme prendra l'acception de singularité, celui qui est différent des autres, puis au XXe la signification de sujet comme responsable de sa destinée.

Avec le XVIIIe, les Lumières et la Révolution Française, le peuple devient non plus un troupeau mais un amas d'individus singuliers qu'il s'agit de reconnaître non plus en bloc mais atomiquement. Ce changement à profondément bouleversé la chose publique. Alors qu'elle était un objet qu'il s'agissait de modelé, elle devint subitement une chose responsable d'elle-même qui décide elle-même pour elle-même. La révolution qui s'en suit est réellement une révolution, un retournement de situation, une culbute. Le dirigeant, le souverain qui régnait sur des sujets, devint un élu désigné par le peuple pour le représenter. Le pouvoir est donc passé d'un seul à tous, et s'il est revenu à un ce n'est pas pour rétablir la situation antérieure mais pour concentré une représentation. Alors que les sujets étaient la marionnette du souverain, l'élu est la marionnette du peuple.

Notre président affirme qu'il incarne la France et son peuple, alors qu'il ne fait qu'incarner l'autorité de l'État, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Le président français est un symbole au sens où il représente autre chose que lui-même, à savoir le pouvoir du peuple qui l'a désigné. Mais le président est autre chose qu'une simple image d'Épinal dans notre constitution. Étant l'incarnation de l'autorité de l'État, il se doit de diriger l'État. Diriger ne prend pas le sens antérieur à la Révolution, il ne s'agit pas de mener paître un troupeau, mais de donner une direction au peuple qui lui décide en fin de compte si c'est celle qu'il veut prendre ou non.

Les rouages de la chose publique se sont quelques peu grippés avec la concordance de l'élection présidentielle et législative et surtout leurs superpositions. Alors que le président donne la direction, l'assemblée décide si oui ou non elle convient, il s'agit donc de contrebalancer deux pouvoirs, qui maintenant avec la coïncidence des deux se trouve balancés d'un seul côté, si l'assemblé et du même bord que le président.

Très bien!, se réjouira-t-on, tant mieux!, c'est qu'alors le président indique une direction qui satisfait l'assemblée! Avançons donc et profitons de cette chance pour aller vite et loin!
Oui, certes et l'opposition n'a que ses yeux ou son imagination pour pleurer.

Mais ma question n'est pas là, n'est pas tant sur cette bizarrerie de calendrier que sur la direction que prend notre président actuel. Quelqu'un sait-il où il va?

Mais ce qui est le plus préoccupant n'est pas tant la direction qu'il prendrait que le flou complet de cette perspective du point de vue du peuple. La chose publique est avant tout une chose “publique" qui concerne tout le monde. Comment imaginer donc que la direction donnée à cette chose ne soit pas publiée ou transparente à tout un chacun?

Ce qui manque de nos jours est la clarté d'un projet, d'un programme, d'un dessein ou bien, et ce qui est pire encore, un projet, un programme ou un dessein.

Il ne faut pas oublié que l'un des héritages de la Révolution est que le peuple maintenant est le souverain et qu'il peut à tout moment reprendre ce qu'il à donné, c'est-à-dire la délégation de ses pouvoirs. Ne pas confondre déférence et indifférence....

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