dimanche 17 février 2008

qu'il nous étonne quelque fois de comment les choses adviennent, ou le retour de Dieu en politique

"...ce qui est bien éloigné de prouver que l'une de ces deux choses est la cause ou le pronostic de l'autre, à moins qu'on ne veuille qu'il soit permis à une femme qui ne met jamais la tète à sa fenêtre, à la rue Saint-Honoré, sans voir passer des Carrosses, de s'imaginer qu'elle est la cause pourquoi ces Carrosses passent, ou du moins qu'elle doit être un présage à tout le quartier, en se montrant à sa fenêtre, qu'il passera bientôt des Carrosses"
(Pierre Bayle, Pensées sur la Comète)


L'époque que nous vivons est passionnante en bien des points et parmi ceux-ci est le fait que le religieux revient avec insistance dans le politique. Non point que ce soit un mal, encore que, mais il est fort étrange de constaté que c'est au nom d'une prétendu perte de repères et que les esprits de nos contemporains seraient déboussolés.
Nos politiques, du moins certains, et le premier d'entre eux affirme l'existence d'un Dieu, seul et unique mais sans trop plus d'information sur le culte ou le dogme qui lui revient puisqu'il s'engage indifféremment et simultanément pour trois grandes religions. Peut-être continuera-t-il sa croisade avec les autres, peut-être que pas.
L'agnosticisme, pour l'heure, ne semble pas une position raisonnable et rationnelle dans l'esprit de ces nouveaux conservateurs semble-t-il puisqu'ils prétendent que les maux de notre sociétés sont liés à une conception trop laxiste et libérale de la laïcité. Être laïc nous dit-on ce n'est pas ne pas croire mais c'est croire jusqu'aux limites des croyances de l'autres.
Le scepticisme n'est donc plus de mise. Ne pas croire serait donc être athée, et sans doute être athée c'est être mauvais. Le doute ne serait donc à bannir. Douter serait mal. Or, le doute n'est pas nécessairement négatif. Sans invoquer Descartes, le doute peut-être simplement prudence: suspendre son jugement parce qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un jugement sur tout ou bien ne tenir pour jugement juste ce qu'il est nécessaire sans plus. La mesure et la parcimonie ont aussi du bon. Ainsi il est possible de s'étonner de la beauté du monde ou de son agencement sans devoir nécessaire en tirer la conclusion qu'un grand architecte en est l'auteur et devoir lui rendre un hommage particulier alors qu'il serait possible de se restreindre à honorer la Nature elle-même, ou bien même simplement se contenter de l'admirer et au passage de la protéger.

Le retour aiguë du religieux dans le politique risque également de conduire à une forme de "chasse aux sorcières" fort dommageable. Si un créateur revient sur le tapis, alors fort logiquement il est non seulement possible mais nécessaire de lui imputer ce qui advient. Ainsi je suis au chômage car le créateur le veut. Le climat se réchauffe parce que c'est dans les plans du grand architecte.
L'hypothèse du tissu social comme unité de la société s'en trouve par conséquent menacée. Le crime n'est plus l'acte d'une personne contre la société, mais un mouvement divin sur l'échiquier de l'humanité.

En somme une nouvelle forme de théodicée est a écrire: comment justifier les maux contemporains alors que réapparaît comme raison politique une raison religieuse. Quelle place donner à l'Homme et laisser à son esprit si lui même redevient une simple marionnette?

Fallait-il vraiment donner raison à Malraux?

C'est un nouveau défi aux penseurs de notre temps. Reste à les trouver....

Aucun commentaire: