dimanche 9 mars 2008

La torture c'est pas bien mais c'est pratique.

Des vidéos sur des pratiques russes qui font froid dans le dos et un président américain qui refuse d'interdire la pratique dite de la baignoire ou du waterboarding qui consiste à "simuler" une noyade pour mettre quelqu'un en position de vous dire ce que vous voulez entendre (Le Monde, 08/03/2008).

La torture c'est pas bien, mais c'est pratique. C'est pratique surtout lorsqu'on se fou complètement des gens mais pas de ce qu'ils disent ou peuvent penser.

L'argument de monsieur Bush est de dire que "parce que le danger persiste, il faut nous assurer que les responsables de nos services de renseignement puissent disposer de tous les instruments nécessaires pour arrêter les terroristes". Évidemment, le terrorisme ce n'est pas quelque chose de très bien et c'est même quelque chose de tout à fait mal, mais est-il possible de faire du mal sous prétexte que le mal qu'il combat est plus fort? C'est une réelle question de théodicée. Il faut croire que nous ne sommes jamais sortie de la théologie naturelle.
Ce que soulève cette question est celle du mal. Vaste problème mais qui mérite qu'on s'y penche à nouveau. Qu'est-ce que le mal et le mal souffre-t-il le degré. Y a-t-il des maux plus forts que d'autres, des maux plus bénéfiques que d'autres ou encore des maux nécessaires. Le discours de justification de lutte contre le terrorisme s'appuie sur des arguments de ce types. Très manichéens ils postulent deux camps: celui du Bien et celui du Mal qui seraient essentiellement et spécifiquement définis de manière intrinsèque et absolue. Quelqu'un qui est mauvais, i.e. dans le camp du Mal, l'est nécessairement et irrémédiablement, idem pour celui du Bien. Ces deux camps absolument déterminés, c'est-à-dire statiquement, sont de manière particulière ordonnés selon une échelle propre, au moins le camps du Bien. Dans ce camps certains maux sont légitimes car ce sont des maux bons. La torture, selon les partisans de cette philosophie est strictement mauvaise lorsqu'elle est pratiquée par un membre du camps du Mal et ne peut souffrir d'aucune justification alors qu'elle est légitime lorsqu'elle est pratiquée par un membre du clan du Bien, car sa bonté intrinsèque légitime tout pratique et méthode comme bonne du fait de son essence. Ainsi monsieur Michael Hayden, directeur de la CIA, justifie la torture en précisant "qu'il s'agit de méthodes du programme de la CIA qui ont été signalées à vos commissions de surveillance, qui sont entièrement conformes aux Conventions de Genève et à la législation américaine actuelle et qui ne relèvent certainement pas de la torture".
Ce qui est intéressant dans cette justification, comme dans toute justification du mal, c'est qu'elle se base sur des critères propres à l'agent, ici la CIA ou la législation américaine. Le mal est toujours justifié par son acteur. D'ailleurs le syndrome de Stockholm n'est pas une justification du mal mais des motifs des agresseurs, ce qui est un petit peu différent.

L'idéal d'une cosmopolotique universelle telle qu'elle était rêvée par les Lumières et les tentatives de mise en place sous forme de Société de Nations ou des Nations Unies tend à ériger des principes universels et donc supérieurs à toute nation qui pose les critères des relations entre nation et entre être humain. La convention de Genève établi ce qu'est ou non la torture et une pratique acceptable.
Mais si ces institutions sont si vertement bafoués par toutes les nations de la Terre c'est que les principes qu'elles édictent ne sont ni universels ni rationnels: ce sont des compromis entre acteurs qui outre d'y figurer agissent dans le coin. Discuter la convention de Genève, savoir immerger un individu pour le priver de respirer relève de la torture ou de l'hygiène est tout simplement indécent mais pire c'est un affront à la raison. Le propre de l'universel est qu'il ne se discute pas.

Les principes fondamentaux ne doivent être édictés que par la raison et s'applique de manière catégorique à tout acte qui tombe sous le jugement de la raison. Les compromis ne peuvent s'appliquer dans le jugement, tout au plus dans la sentence. Rendre culturels ou cultuels les pratiques et les droit de l'Homme c'est nier simplement leur application et leur validité. L'accepter c'est reconnaître que les principes posés ne sont pas bon ou bien que le projet n'en est pas souhaité. L'un comme l'autre c'est une insulte fait à la raison.

Ce qu'il faut constater c'est que les Lumières sont une erreur de l'histoire humaine, un épiphénomène heureux mais qui malheureusement n'a ni été vu ni été compris semble-t-il...

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