jeudi 6 mars 2008

Travailler, pourquoi faire: ou le sens de la vie.

Nouveau chiffre et nouvelle polémique. Le chômage baisse selon le ministère, les chiffres sont faussés selon les organisations sociales. Typique. Le dialogue se porte bien ouf.

C'est quoi un chômeur? Quelqu'un qui ne travaille pas me dira-t-on certes. Mais travailler c'est quoi? Combien de fois ai-je entendu qu'un doctorant ne travaillait pas! Certains doctorants, certes pas tous mais certains payent des impôts, oui, c'est bizarre mais c'est comme ça. En France on paie des impôts sur les allocations de recherche, mais on ne "travaille" pas. Payer des impôts n'est d'ailleurs pas un critère car des gens qui "travaillent" n'en payent pas.

Je viens d'un milieu utopiste où le mot “travail" contient dans son intentionalité "existence". C'est très très utopique, je ne dis pas le contraire, mais travaille signifie faire quelque chose qu'on a envie de faire pour le faire. C'est un sens très biaisé et sans doute que ce type de travail rime avec œuvre, mais qu'importe. Même en prenant un sens plus large et sans doute plus consensuel bien que plus éloigné de la réalité encore, travail pourrait vouloir dire “créer de la richesse". C'est une définition que j'aime assez. On travaille pour créer quelque chose, en l'occurrence de la richesse. C'est bien, c'est positif. Le problème évidemment est que la bonne moitié des travailleurs ne créés pas grand chose que ce soit matériel ou non. Je me souviens d'un secrétaire qui passait sont temps plus à créer des ennuis et des embêtements qu'autre chose. Je ne dirai rien de quelques conseillers... bref.

L'inconvénient de cette définition du travail comme création de richesse est quelle permet d'inclure dans son extension les doctorants. Au risque de faire se hérisser quelques cheveux, un doctorant produit une richesse très rare (mais hélas pas très chère au cours actuel du marché): de la connaissance, du savoir, de la curiosité. Alors évidemment ce n'est pas très en vogue et les directives du ministère sont plus à dire que ça serait beaucoup mieux si les chercheurs arrêtaient de créer de la connaissance ou du savoir et commençaient à faire quelque chose de sérieux et d'utile. On croit rêver mais ce n'est que le XXIe.

Il y a un sésame particulier dans le monde du travail, c'est le CV, le curriculum vitae, ou chemin de vie en clair. C'est le parcours, le cursus d'un individu. Bien que tout recruteur demande un CV il n'est pas évident du tout de savoir ce qu'est un chemin de vie. Si vous y mettez quelque chose d'existentiel ça donnerait la liste de ce que vous avez aimé faire, si vous êtes optimiste, ce que vous aimeriez faire, si vous être avide de reconnaissance et de bonne note, la liste de vos diplômes et de vos récompenses, si vous n'avez pas grand chose à dire, liste des compétences un peu vagues... Un CV c'est une chronique nécrologique donnée par son porteur. Une aberration à la mode.

Une principe catégoriel fort étrange préconise d'embaucher quelqu'un sur un poste si et seulement si la description du poste correspond à la description du CV. Le CV doit se baser sur des faits réels tout en demandant une généralisation et une expertise du "savoir-faire" et "savoir-être" explicite. Trimbaler non seulement des faits mais leurs interprétation. Soit. Donc le CV est un code barre que l'on ne peut changer et qui ouvre ou non la voie à un emploi. Mais si les choses étaient si simples ça irait bien. Elles ne le sont évidemment pas. À ce principe s'ajoute un autre: le CV est un "signal social", une étiquette qui détermine la position de l'individu dans le protocole sociale. Mais assez étrangement l'échelle sociale qui sert de critère ne se base pas sur la même définition du travail. Au lieu de "création de richesse" elle ne retient qu'une définition pseudo-étymologique du travail comme "torture". (Je rappelle au passage que cette définition outre qu'elle soit un peu vaseuse ne rend pas hommage au femme délivrant leur enfant puisque cet événement est également nommé "travail", bref.) Travail = torture. Le côté humaniste et existentialiste fuit. Travailler n'est pas créer de la richesse mais enrichir un patron qui vous fait la bonté de vous employer. Le CV se base donc sur une échelle sociale économique et inutile de dire que de présenter un pedigree supérieur à celui de l'employeur est très très très mal venu. D'ailleurs est-ce un hasard si les chercheurs sont les plus dénigrés socialement? Ayez un doctorat on vous traitera de nanti qui perd son temps.

On m'a raconté l'histoire un gars qui avait un master de je ne sais plus quoi et qui préférait rester veilleur de nuit plutôt que d'avoir un emploi en CDD de contrat pro à 70% du SMIC. On m'a parlé de ce scandale et de ce manque d'ambition. On n'a jamais regardé le salaire et surtout le statut social. Évidemment que quand on a un master on veut un boulot de master et non pas un simili truc qui n'offre aucun des avantages liés au statut de master. Évidemment, parce que c'est le critère réel de la réalité sociale actuelle. C'est tout. Dans un autre monde, dans un autre contexte quelqu'un en master serait très bien veilleur de nuit si cela lui permet le jour de pouvoir lire ou écrire ce qui lui plaît. Évidemment, parce que ce schéma social est un schéma où on travaille pour payer un loyer, manger et se nourrir et non pas pour créer quelque chose, ne serait-ce de la richesse. C'est pour ce la que la société s'appauvrit, simplement parce qu'elle n'utilise pas le bon critère de richesse. Alors évidemment il y a de moins en moins de chômeurs parce qu'il y a de plus en plus de gens qui ne jouent pas à ce jeux. Un chômeur, en France est quelqu'un qui cherche activement un travail en CDI depuis moins de 6 mois.... qui voudrait encore d'un CDI en France? D'ailleurs, ça existe encore un CDI? À 30, le seul que je me souviens avoir vu était plein de livres au collègue.

La question maintenant est celle de savoir pourquoi. Pourquoi vivre ou pourquoi travailler? Je n'aime pas les pourquoi mais trop la vie. Alors sans être ni chômeur ni travailleur je veux créer de la richesse. Écrire, faire des images, des films, ce que je fais parce que c'est ce que je crois que je dois faire pour, arrivé au seuil de la mort, me dire que je ne regrette rien, non... parce que j'aurais créé de la richesse et qu'importe si elle n'a pas encore été découverte, qu'importe qu'elle le soit, parce que la vraie richesse et de n'avoir pas eu l'impression de gâcher mon temps. Le temps c'est de l'argent... mais le plus important dans la phrase est ce qui a de la valeur, pas la valeur... le TEMPS... créer de la richesse, n'importe quoi... c'est ce qui me paraît à moi capitale, nécessaire, qui vaut la peine. Le reste n'est que querelle de termes, de mots, de chiffres...

Un jour viendra où l'on se dira qu'un étudiant créé autant de richesse qu'un ouvrier à la chaîne et alors le balancier cessera d'oscillé de critique de l'un à l'autre, de droite à gauche pour enfin allé droit devant....

Utopiste je disais....

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