mardi 21 avril 2009

Séquestration de patrons...

Au petit écran, le présentateur, bien coiffé, costume bleu et cravate à rayure ne sait plus où donner de la tête.

Les médias en ont rêvé: une info bien croustillante, violente même comme un volcan en éruption, pour montrer un peu de spectaculaire, donner un visage à la crise.

Et puis voilà que ça arrive: des entreprises licencient voire ferment sous couvert de la crise, même si les profits sont parfois bien juteux. On ferme, on met des ouvriers à la rue.
Alors l'ouvrier humilié se révolte. Il crie, mais on lui demande de la boucler. Il hurle, on lui demande de se calmer. Alors il se débat, il bloque le patron dans son bureau. Il barricade le portail, on lui envoie les forces de l'ordre.

Les responsables syndicaux sont débordés. De toute manière ils ne représentent plus grand monde. Le patronat crie qu'il ne peut discuter avec une foule. Il demande de l'ordre. On appelle à la police, elle charge, on en jette en prison.

Au petit écran on s'indigne et on pleurniche sur l'ordre social ébranlé, sur la violence de l'ouvrier comme une bête sauvage qu'il fait canaliser coûte que coûte. On fait une nouvelle loi, puis une autre.

On ne comprend pas comment un ouvrier peut en arriver à détruire son outils de travail. On trouve ça choquant.

Ils ne savent pas ce qu'est le chômage.

Ils ne se rendent pas compte qu'on vit bientôt mieux en prison qu'en détresse.

Alors on passe au sujet suivant: la coupe de football...

lundi 20 avril 2009

Question de discrimination.

Imaginez que vous vouliez aller au hamman et qu'on vous informe que la soirée est réservée aux femmes ou, pire, aux gays, et que vous vous être un homme hétérosexuel, considériez-vous que vous êtes victime d'une discrimination?

Je présume que non. Je présume que non car rien de vous oblige à aller au hammam ou à ce hammam là, et vous pouvez toujours vous repliez sur un autre hammam ouvert aux hommes hétérosexuels, même si c'est moins drôle.

Empêcher à une personne de faire quelque chose qu'elle n'est ni obligée de faire ni qu'il nécessaire de faire, il est difficile de considérer que cette personne est victime d'une discrimination. C'est la réponse qui a été faite à un homosexuel qui souhaitait donner son sang.

Comme on le sait, l'EFS (établissement français du sang), organisme habilité à collecter le sang en France, ne permet pas aux homosexuels, entre autre, de donner leur sang du fait du haut risque de contamination du sang lié à leurs mœurs déviantes et dangereuses. La Halde (haute autorité de lutte contre des discriminations et pour l'égalité) souligne que refuser à un homosexuel n'est pas faire preuve de discrimination puis que le don du sang n'est pas un droit, mais « le don du sang, à travers les concepts qui lui sont liés de générosité, de solidarité, et de conscience de l’altérité est un devoir d’aide et d’assistance et non un droit fondamental et inaliénable. Ce devoir d’assistance implique le respect des impératifs de sécurité.
Cependant, il convient de ne pas transformer ce principe légitime de sécurité en stigmatisation ou en mesure qui peut être considérée comme discriminatoire » (document de la Halde).

La question de la discrimination est donc complexe puis qu'il s'agit à la fois de savoir ce qui relève d'un droit et ce qui n'en relève pas et de la manière de pouvoir satisfaire un droit.

Le risque est de considérer une manière a minima de répondre à un droit qui relèverait de la discrimination et une manière d'y répondre de manière plus substantielle qui elle ne le serait pas. Prenez le problème du remboursement des lunettes de vue par exemple: la sécurité sociale rembourse un forfait minimum qui correspond à une paire de lunette entièrement remboursée ou remboursable. Évidemment ce ne sont pas les plus fashion qui soit mais elles permettent de voir. Si vous voulez être fashion vous devez en être de votre poche et alors les riches sont plus chanceux que les pauvres. En ce sens il n'y a pas de discrimination insupportable puisque le droit à compenser une handicape est respecté et que d'avoir des lunettes fashion n'interfère par avec le fait d'avoir une correction optique appropriée.

Le risque est de généraliser ce type de raisonnement. Si le travail est un droit, le fait d'avoir accès à un travail intéressant ou rémunérateur peut être considéré comme un plus esthétique non nécessaire et donc pouvant faire l'objet de discrimination. Une fois un emploi “raisonnable" fourni, la guerre est ouverte avec n'importe quelle arme.

Dans le cas du hammam il n'y a pas discrimination dans la mesure où il y a d'autres hammam qui sont ouvert pour la personne désireuse d'y aller. Le problème serait différent si pour une raison différente de votre propre bien-être ou sécurité (imaginons qu'une personne cardiaque ne puisse aller, pour des raisons médicales dans un hammam) l'accès à un lieu ou à une activité ou un événement vous est interdit, alors vous pouvez considérer que vous faites l'objet d'une discrimination.

Or ces restrictions ne sont pas suffisantes: je ne suis pas en train de dire qu'il faut vendre de l'alcool au mineurs sous prétexte que leur interdire serait discriminatoire, d'autant que cela irait à l'encontre de leur bien-être et de leur sécurité, ni qu'il faut laisser n'importe qui entrer dans les hammams gays, mais il est possible qu'il faille prendre en compte non pas uniquement le bien-être et la sécurité de l'individu mais aussi ceux de la collectivité. Ainsi il est possible d'interner une personne parce qu'elle nuit à la collectivité. Ce n'est pas une discrimination en tant que tel puisqu'elle répond à un impératif de cohésion sociale.

C'est cet argument qui permet à l'ESF, sous couvert du gouvernement d'écarter les homosexuels du don du sang. Les homosexuels, par leurs comportements et leurs mœurs peu fiables, n'est-ce pas (dites moi, savez-vous le pourcentage d'hétérosexuels qui trompent leur conjoint, selon les chiffres cela oscille entre 60% et 80% des couples qui ne sont pas d'une fidélité à toute épreuve, bon évidemment, pas vous), et que cela est un facteur de risque trop élevé pour risquer de contaminer le transfusé. Outre que les poches de sang sont testées avant la transfusion (j'espère, et j'ai toujours été fasciné par l'argument selon lequel les poches sont testées en groupe mais qu'ils vous envoient quand même le détail du test de votre sang -- la magie de l'induction je suppose), il est tout à fait possible de concevoir que le sang des pédés ne doit pas contaminer le sang des hétérosexuels, mais pour qu'il n'y ait pas discrimination il faudrait qu'il existe une possibilité pour eux de donner leur sang avec les précautions requises (par exemple en testant individuellement les poches (mais je sais ça coûte trop cher) ou bien en lot de poche de pédé (mais là soudainement ça sonne discriminatoire). Parce qu'il ne faut pas charrier: tous les pédés ne sont pas des folasses et personnellement je connais des couples homosexuels plus fidèles que des hétérosexuels, mais c'est une autre histoire.

L'autre point qui titille la question est celui des archives de l'EFS qui, une fois qu'elle vous a estampillée PD vous refoule quoi qu'il arrive, à vie.

Un article du Figaro du jour relate la n-ième mésaventure d'un homosexuel qui pensait être civique en donnant son sang et qui considère encore que vraiment c'est injuste de ne pas avoir le droit de le faire.

Au fait, l'intelligence est-elle aussi un comportement déviant? Car il semble que beaucoup de postes ne soient pas accessibles aux intelligents, sur la base de critères stupides, évidemment.

mardi 14 avril 2009

Les jeunes: maux de vieux

Le Monde ce matin: “Un mineur tué dans une bagarre à proximité de la gare de Lyon". Le Figaro: "La violence des bandes ne peut rester impunie", un peu plus loin "Les pistes pour relancer l'emploi des jeunes".

Sur un plateau télé, un sociologue est appelé à la rescousse. Le journaliste: comment expliquez-vous cette soudaine montée de violence chez les jeunes. Le sociologue, vous savez, c'est un non événement, il n'y a pas plus de violence qu'avant, même moins, mais on en parle plus c'est tout. Mais comment réagir demande le journaliste. Il ne faudrait pas faire comme les pompiers, toujours éteindre le feu, mais prévenir. Il faut faire de la prévention et les deux causes majeures sont l'échec scolaire et le chômage. L'autre journaliste, oui mais ça c'est bien beau et ça prend du temps, mais là tout de suite, qu'est-ce qu'il faut faire, une nouvelle loi?

"En outre, les jeunes étant - par définition - une population difficile à contrôler, il suffit souvent d'une réforme mal expliquée - type contrat première embauche (CPE) en 2006 - pour les faire descendre dans la rue par centaines de milliers": l'article du Figaro.

La dialectique ne change pas beaucoup. La crainte du jeune, le jeune instable, le jeune qui ne veut pas travailler, le jeune pas qualifié, le jeune pas sociable, le jeune violent, le jeune en échec, le jeune...

Et puis d'un coup le jeune devient vieux. C'est comme le miracle des vacances scolaires durant lesquelles l'étudiant de seconde année, nul, évidemment, devient soudainement un L3 (licence troisième année) intéressant et intéressé. Les miracles de la vie.

Demain sans doute qu'il y aura encore un article de fond transformant un fait divers en fait de société. Deux jeunes se battent dans la rue sous le regard hagard d'un bon père de famille qui vient de claquer sa femme et qui fini amèrement les dernières gouttes épaisses d'un liquide visqueux fort en alcool. Le scandale et sous ses yeux et il pense le voir.

En poursuivant cette dialectique il suffit de parquer les jeunes pour protéger les vieux, qui soit dit en passant ont souffert de la rudesse de l'hiver, rien ne va plus tout se déglingue.

"Dernière idée de Laurent Wauquiez : des «formations rebonds» pour les jeunes qui se retrouvent sans activité à la fin de leurs études. «Il s'agit de leur proposer des stages commandos, des formations d'une durée de six mois, dans des filières où il y a des besoins, explique-t-on à Bercy. Un bac + 3 en psychologie condamné au chômage faute de débouchés suivrait par exemple une formation commerciale dans un métier porteur.»" Figaro toujours.

Du génie, du génie! quelle idée géniale. Alors là on applaudit des deux nageoires et on attend qu'un vieux (les derniers intelligents de l'espèce) demande pourquoi qu'on payerait encore un centime pour une formation qui mène nulle part. Pourquoi ne pas simplement faire une filière unique "représentant de commerce" directement, ça serait plus efficace et au moins il y aurait nettement moins de chômeur. J'oubliais qu'on faisait de la politique avec des Légo...

L'équation pourtant est maintenant simple et la pédagogie gouvernementale l'éclaire:

• jeune + banlieue = échec scolaire = violence

• jeune + études nulles (i.e. non commerciales) = chômeur

équations qui se résolvent de la sorte:

• jeune + banlieue = échec scolaire = violence + nouvelle loi = prison = baisse du chômage

• jeune + études nulles = chômeur + formation 6 mois commerce = plein emploi

Hmm pourquoi ne suis-je pas convaincu?


Bien évidemment les choses sont plus compliquées que ça. Évidemment que la psycho (je ne parle même pas de la philo) ne mène à rien. Enfin, il faut expliciter l'axiome du “ne sert à rien économiquement", bien que...
D'une part je ne suis pas sûr qu'une société de service pur et pur nous mène au plein emploi sinon peut-être, au mieux, jusqu'au prochain grand badaboum ou qu'un ancien, donc sage, aux affaires depuis trente ans, nous dise qu'on a bien vu que ça ne marchait pas et qu'on aurait du l'écouter quinze ans plus tôt.

Notre société, telle qu'elle fonctionne n'est pas très loin des camps pour jeunes. Le chômage guette le vieux donc, par ordre de bien séance, on demande au jeune de patienter (il est encore trop con pour être opérationnel) alors on le parque sur un banc l'école, puis de prépa, puis d'université, puis de post-diplôme puis... et pendant ce temps le jeune vieilli et d'un coup devient vieux, mais alors le vieux lui dit qu'il n'est encore jeune (le vieux) et qu'il faut qu'il attende encore un peu.
Et puis le vieux rit, il dit que le jeune est nul parce qu'à trente ans il est encore à l'école, qu'il est donc nul, donc qu'il doit attendre.
Alors le jeune en attendant refait un autre diplôme, enseigne à d'autres jeunes, fait d'autres études, d'autres recherches en attendant.
Le vieux le regarde un peu bizarrement, il se demande bien quel trafic il fait pour payer un loyer aussi exorbitant sans travailler. C'est louche. Alors le vieux lui dit que maintenant que c'est la débandade sur les marchés, le jeune doit attendre.

Un jeune en à marre d'attendre. Non pas un emploi, non pas un boulot, non pas une vie, non, ça il ne sait même pas ce que c'est parce que son père est jeune, donc au chômage, non, d'attendre le bus. Alors il le dit, un jeune ricane, ils se tapent dessus. Hop en haut du Figaro. Les jeunes se rebellent! Ils sont en difficultés scolaires donc la cause du chômage.... C'est repartit.

Heureusement il y a le temps. Il y a le temps qui passe et les jeunes restent plus longtemps que les vieux. Un jour viendra où il n'y aura plus de vieux, plus que des jeunes, des jeunes vieux, mais jeunes. Il y aura toujours autant de faits divers, de chômages, de livres de philosophie et de types complètement perdus qui feront de la psycho parce que ça sera le seul diplôme qu'ils n'auront pas encore. La différence, peut-être, est qu'on ne dira plus alors que la faute incombent au jeunes, mais peut-être aux enfants. Querelles de mots en fin de compte.

Alors, un maux valant mille mots on légifère, on fait une loi, on l'oublie, on ne signe pas le décret d'application, on regarde les chiffres de la bourse et on attend secrètement le journal du lendemain pour se trouver une occupation à la petite journée.

Bien sûr faire de la politique c'est compliqué, mais ça ce sont les philosophes qui le disent et tout le monde sait qu'ils ne servent à rien. Alors le vieux fait de la politique non philosophique: il tape sur les jeunes avec des mots pendant que les jeunes (f)ont des maux...

mercredi 8 avril 2009

Université: une année blanche?

L'année avance et avec elle les problèmes. Maintenant que le mouvement se poursuit depuis plusieurs semaines et que les cours sont bloqués depuis parfois 10 semaines lit-on dans les journaux, qu'advient-il de l'année universitaire?

La question qui se pose maintenant est celle de savoir que faire d'une année à moitié amputée.

Fidèle à sa stratégie, le gouvernement a attendu que la gangrène fasse son œuvre pour que le problème pourrisse et se transforme sans devoir vraiment le régler. Le problème initial des revendications des universitaires devient maintenant celui des étudiants.

Il est vrai que de prendre en otage quiconque n'a jamais été une très bonne idée, en l'occurrence force est de constater que les étudiants y ont perdu quelques plumes. Et lorsqu'on dit “comprendre" ces rétentions cela ne signifie pas qu'on les approuve mais que l'on est conscient de la gravité de ce qui a pu mener à un tel acte, ce qui n'est pas tout à fait la même chose, sans compter que de ne pas prendre en considération les remarques ou les revendications d'une personne revient à le prendre également en otage, ce qui n'est évidemment pas mieux.

Une rétention des notes plutôt que l'annulation des cours aurait sans doute eu un meilleur effet et un meilleur résultat: enseigner tout en refusant de délivrer un quelconque diplôme en validant les notes. Les étudiants auraient été pénalisés tout en ayant tout de même emmagasiné les connaissances nécessaires et la situation aurait pu être débloquée aussitôt le conflit réglé. Ici certains ont perdus un semestre donc une année.

Les propos accusateurs de la ministre, repris dans Le Figaro ne sont pas vraiment pour rassurer sur la résolution rapide et pacifique du conflit. Mais que faire?

Annuler les examens et donner la moyenne à tous les étudiants privés de cours serait une injustice vis-à-vis des autres mais également valider des connaissances absentes et ce qui revient à cautionner le fait qu'on n'apprend rien à l'université mais qu'il faut un diplôme pour travailler (or les deux prémisses sont fausses comme le démontre l'expérience).

Reporter les notes du premier semestre au second ne serait pas mieux. Que reste-t-il alors? Ce que semble vouloir la ministre: que les enseignants mettent leurs poings dans les poches et triment en cours supplémentaires et zippés afin de faire un semestre en trois semaines et valider une année dans la précipitation. Cela est certes possibles sur le papier ou en rêve mais peu probable dans la réalité des Hommes car c'est bien méconnaître le fonctionnement d'un étudiant: c'est croire qu'un étudiant est comme un disque dur sur lequel le prof se content de copier des fichiers, or un étudiant a besoin de temps pour comprendre et se mettre en condition pour apprendre, sans compter qu'il faut re-mobiliser des étudiants qui n'attendent probablement pas sagement dans leur petit mansardes que les grandes personnes règles leurs petites histoires. En trois semaines ce ne sont pas les connaissances que l'on va accroître mais bien la consommation d'anxiolytiques.

Annuler l'année et reconnaître que ce sont les étudiants qui payent les pots cassés en perdant une année ou un semestre? Ce serait une injustice incompréhensible, d'autant que ce sera à pure perte pour certains qui n'auront pas les moyens d'attendre une année de plus.

À moins d'aller vraiment dans l'optique de la semestrialisation en permettant que le premier semestre soit conserver et que les étudiants puisse effectuer leur semestre manquant à l'autonome en rendant réellement autonomes est semestres et en découpant les diplômes non pas en années mais en modules. Certains étudiants auraient alors perdus un semestre, ce qui est moins pire que de perdre une année entière (semestre qu'ils conservent quoi qu'il arrive d'ailleurs) et gagnés en liberté. Cela signifie également que les droits d'inscriptions devraient être semestrialisés et que les enseignements soient réellement des modules que les étudiants peuvent choisir et non pas choix de seconde main entre un tronc commun rigide et des options qui n'ont rien à voir ou si peu avec. Autrement dit cela ne signifie pas que les étudiants ayant obtenus le premier semestre doivent attendre le second semestre 2010 pour valider le second semestre 2009 amputé, mais qu'ils doivent pouvoir le faire au premier semestre 2010. Bonjour l'organisation des enseignements mais bon, rien est impossible puisque cela se passe bien dans d'autres pays...

Cet état de fait est peut-être une occasion de mettre sur pied une vraie réforme en profondeur de l'université, mais il semble que ce ne soit pas vraiment l'objet du débat ni du conflit actuel...

mardi 7 avril 2009

La distance avec le sujet

Dans un petit restaurant autours d'un couscous. L'un des convives, par ailleurs étudiant en première année de philosophie explique pourquoi il dévore des yeux la viande dans le plat au centre de la table: il est devenu végétarien. Ses raisons sont un peu obscures et confuses, elles tournent essentiellement autours de la maltraitance des animaux. Par provocation je lui dis qu'il doit alors admettre que tout ce qui vit à une âme (enfin, cela vient après un raisonnement un peu plus construit) et donc s'abstenir aussi de manger la semoule. Il prend tout cela au sérieux et cherche des contres arguments.

Il me parle d'une secte quelque part en Inde qui ne mange que ce qui tombe des arbres, il a oublié le nom et le cherche. Toujours provocateur je lui demande si ce ne sont pas les newtoniens. Un bref moment d'hésitation puis il éclate de rire.

Nous discutons un peu sur ce que peuvent bien manger ces hommes-là et il me dit que c'est un peu trop restrictif à son goût. Mais il suffit de mettre tout ce qu'on veut manger dans l'arbre et de le secouer, ou d'attendre qu'un enfant y soit grimper, de secouer l'arbre et de lui dire, avec des gros yeux bien effrayant que s'il ne veut pas qu'on le mange il faut qu'il aille nous chercher du chocolat au supermarché.

En fait, dans toute situation il y a une manière de la tourner de sorte qu'elle paraît moins exiguë qu'il n'y paraît. L'inverse est aussi vrai.


Dans cette discussion ce qui a le plus surprit le végétarien et qu'il soit possible d'être ironique à partir de choses sérieuses. Il a tendance à croire que la philosophie est une chose sérieuse.

C'est peut-être cela qui définie la force dans une discipline: la capacité à prendre de la distance avec le sujet.

Bien entendu cela n'a rien à voir avec la grandeur d'esprit mais c'est une attitude fort utile. Je me souviens au début de mon enseignement, encore idéaliste vis à vis de la philosophie, je ne supportais que difficilement que des étudiants puissent remettent en cause ce que j'admirais tant dans un raisonnement ou dans une œuvre.

À force d'entendre des âneries et de se prendre des coups on fini par comprendre que ces projectiles n'atteignent pas leur cible car ce ne sont que des tirs à l'aveugle plus défensifs qu'offensif. Une fois cela comprit la stratégie est beaucoup plus simple, calme et efficace.

J'admire, dans le fond, la candeur et la naïveté dont on fait preuve en première année encore. Idolâtrant quelques auteurs, violemment virulent contre d'autres, encore en quête d'une vérité que l'on pense pure et absolue.

Avec le temps et les coups on comprend que la chose est plus simple car plus complexe. On comprend aussi que l'existence reste indépendante de la fonction et de la discipline. On fait la part des choses, on se prend moins au sérieux, et en définitive c'est comme cela qu'on arrive à aller plus en profondeur là où d'autres ne pensaient même pas aller, aveugler qu'ils sont par la lumière.

Prendre un peu de distance avec le sujet pour se donner au moins l'espace d'en rire ou de l'admirer...

lundi 30 mars 2009

Cadrage et cinéma

N'oublions pas que le cinéma n'est qu'un moyen d'expression à l'instar de l'écriture. Il y a autant de manière de faire du cinéma qu'il y a des manière d'écrire et presque autant de genres.

Le montage est un élément essentiel du cinéma, de l'image animée et de tout média multimodal en général, nous avons déjà évoqué cet aspect. Mais en tant qu'il traite avec l'image, le cinéaste doit également prendre en compte la question du cadrage.

Le cadrage est particulièrement délicat dans le cas du film document et le cinéma ethnographique. En effet il s'agit de montrer alors un événement et la manière de le concevoir implique un certain cadrage et un certain cadrage implique nécessairement une manière de concevoir l'événement.

Deux options radicales s'opposent: une version contemplative ou objective versus une version analytique et interprétative. La premier pose la caméra sur un pied l'événement au grand angle in extenso sans coupe ni mouvement si ce n'est pour suivre l'événement dans sa totalité si celui-ci y oblige.
L'autre tourne l'événement de l'intérieur en cadre les éléments saillants et recompose la totalité à partir de ces repères. Cette technique découpe l'événement pour le construire ou le reconstruire à partir de son interprétation et sa compréhension qui ont guidé son tournage.

La version “objective" est proche du nominalisme: elle considère que chaque événement est particulier et en tant que tel ne peut pas être découpé sans altération. Le point de vue “extérieur" vise justement à garantir l'objectivité du tournage, à ne pas prendre position pour laisser l'événement “parler de lui-même" et s'il demande une explication c'est au spectateur de la trouver. Au pire une voix off commentera de manière professorale et détaché ce qui se passe.

La version constructiviste est plus analytique et cherche dans l'événement des points forts et des articulations qui en un sens revient à y chercher une structure avec des invariants qui permettent de le comprendre en le rapportant à d'autres événements, des catégories ou des lois. Le montage recompose l'événement, l'image est proche des articulations et des temps forts et cherche à les cadrer au mieux en fonction de leurs natures (agent, moyen, relation). Dans l'idéal l'événement ainsi recomposé devient intelligible par son exposé même et peut se passer de commentaire, sinon pour ce qui l'image ne peut montrer.

Les premiers films paraissent longs, les seconds décousus et compliqués, mais c'est le prix pour “voir" et “montrer" les événements et faire un cinéma similaire à un article scientifique ou à une thèse.

Évidemment ces deux positions sont extrêmes et caricaturales, et bien sûr l'ensemble du spectre entre ces deux jalons une multitudes de points de vue sont possible, quoi qu'il en soit le cinéaste ethnographe doit choisir et se prononcer sur son choix.

jeudi 26 mars 2009

Un métier / une formation: tentative d'expliquer le plein emploi en temps de chômage de masse.

Dans un article du Monde daté du 26 mars 2009, intitulé "Comment expliquer les milliers d'emplois non pourvus ?", l'auteur, Rémi Baroux conclut son papier en citant une conseillère du Pôle Emploi:
"je pense que la crise va inciter les gens à se réorienter, dit-elle. Quand j'ai des jeunes femmes, qui viennent du tertiaire et ne trouvent pas d'emploi, je les provoque, je leur dis “faites soudeur”."

Je suppose que la provocation en question tient au fait que les jeunes femmes en question, mais nous pouvons élargir la cible pour en propos, ne veulent pas se réorienter, ou du moins est-ce là la croyance qui transparaît dans ces propos.

Certes il n'est pas plaisant a priori de postuler à des emplois radicalement différents de ceux auxquels nous pouvions prétendre ou croire prétendre avec un diplôme particulier. Il est certain que si une de ces jeunes femme a préparé un BTS de communication visuelle et qu'en définitive une conseillère de feu l'ANPE lui propose de devenir soudeuse, il est fort à parier que le rictus sera un peu coincé, mais pourquoi pas.

Ce qui est plutôt étonnant dans cet article est la position symétrique des recruteurs qui à l'image du Pdg cité, affirme:
"Malgré la crise et mes efforts d'anticipation, je n'arrive pas à trouver", dit M. Sanguinetti. "Le niveau de formation est trop faible et les jeunes manquent de motivation", regrette-t-il.

Auquel il faut ajouter une remarque tout aussi pertinente d'une responsable d'agence d'intérim:
"même les jeunes sont réticents à bouger"

Décidément ces jeunes ne sont pas très coopératifs.

Expliquez leur simplement comment concilier le judicieux conseil de la reconversion avec la critique du manque de formation. Comme expliquez que des offres de premier emploi demandent des stages de plus de 6 mois ou des expériences de 2 ans? Sans soulever la question salariale.

Un chômeur est-il prêt à se reconvertir dans une branche différente de celle de son expérience ou bien un jeune diplômé à accepter un poste différent de celui de sa formation? c'est une première question importante.

Mais la seconde qui se lève immédiatement l'est tout autant: un employeur est-il prêt à embaucher un chômeur en reconversion ou un jeune diplômé à un poste différent de celui de sa formation?

Je crains que la négative soit plus radicale à la seconde et qu'elle bloque toute réponse à la première.

D'autant qu'à y regarder de plus près quel métier ne peut ne pas s'apprendre? Évidemment que cela demande une formation interne ou complémentaire et c'est sans doute ce point qui baisse plus que la motivation ou la mobilité.
L'essentiel pour ne pas dire toutes les tentatives d'envoyer une candidature sur un poste dont le CV ne correspond pas trait pour trait au profil n'a quasiment aucune chance d'aboutir sinon à un envoie automatique de refus.

Bien entendu que dans le meilleur des mondes tout employeur souhaiterait embaucher l'employé parfait qui correspond parfaitement au poste, mais ce monde là n'est qu'un fantasme ou, pire, issu d'une conception archaïque du travail (sans compter d'autres caractéristiques plus irréalistes encore comme le fait qu'il soit jeune mais qualifié, en bonne santé, sans famille ni attache, non syndiqué, docile ou gratuit).

Le travail est une activité dynamique qui s'adapte à l'instant à l'offre, la demande et aux circonstances. Si une entreprise n'est pas flexible, elle devient vite dépassée. N'importe quel bon gestionnaire le reconnaîtra. Pourquoi alors ne pas appliquer ce principe au travail même? Comment ne pas comprendre que cette dynamique s'opère également au niveau de l'employé?

Ce fantasme de l'employé directement opérationnel témoigne d'une ignorance profonde de celui-ci et sa confusion avec une machine-outil ou un robot, et encore.

Pourquoi un docteur en philosophie ne serait pas tout à fait apte à devenir conseiller à l'emploi, responsable de RH dans une entreprise, électricien ou boulanger? Parce qu'une telle mobilité est encore trop perçue comme une reconversion quand ce n'est pas un échec et que de tels “mutants" bougent et transgressent les règles d'un corporatisme encore bien vaillant.

Dans les circonstances économiques actuelles le sport de la recherche d'un bouc émissaire est repartit de plus belle: pour certains ce sont les partons, pour d'autres les jeunes, d'autres encore les politiques et pour ceux-ci le capitalisme lui-même.
Pourquoi une telle soif de sang?
Pourquoi ne pas simplement essayer de comprendre ce qui se passe, ce qui ne va pas et comment faire en sorte que cela marche mieux? Pourquoi ne pas enfin s'attaquer au problème plutôt que d'en trouver un responsable?

Est-ce par manque de motivation? Manque de mobilité? Ou manque d'audace pour enfin faire quelque chose d'autre que ce qu'on a toujours fait i.e de réorientation?

La critique ne vise finalement pas toujours ceux qu'on croit...

jeudi 5 mars 2009

Joris Ivens: attention chef d'œuvre!

"Regen" ("La pluie")
Pays-Bas/1929/15 min/N&B/muet/35 mm
Prise vue et montage: Joris Ivens
Scénario: Mannus Franken

L'arrivée de la pluie sur Amsterdam. Des images superbes, une poésie du réel à couper le souffle. À voir ou à revoir impérativement et à classer parmi les plus beaux films qui soit.

Heureusement maintenant disponible en DVD, cela ne vaut pas l'ambiance d'une projection mais c'est déjà ça.

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lundi 23 février 2009

Identité nationale: question de définition du même.

L'une des définitions donnée de l'identité est exprimée par le principe des indiscernables que l'on doit à W. G. Leibniz (Discours de Métaphysique, section 9).
Deux substances sont indiscernables si elle partage l'ensemble de leurs propriétés.

∀F(Fx ↔ Fy) → x=y

Cela vaut pour la métaphysique et la question ontologique ou une question de logique formelle.


La question de l'identité surgit maintenant dans le domaine politique, notamment dans l'appellation d'un nouveau portefeuille ministériel, comment définir l'identité d'un point de vue social ou humain?

Le même principe peut s'appliquer tel quel: deux individus sont identiques s'ils partagent les mêmes caractères. La définition des caractères en question reste alors à définir, ce qui laisse également ouverte la possibilité d'utiliser les tests ADN ou autres. Cependant cette notion de caractères, de propriétés ou de traits caractéristiques peut vite devenir problématique d'un point de vue éthique et moral, puisque pour une bonne part ces caractères en questions ne sont pas dépendants des individus et par conséquent toute utilisation de ceux-ci peut conduire ou conduit de facto à une discrimination qu'elle se veuille positive ou non.

Si ce critère est pris en compte, cela signifie que tout ce qui ne dépend pas de l'individu ou pour éviter toute confusion, de l'agent cognitif, ne peut être utilisé directement dans la définition sociale de l'identité, cela signifie qu'il faut s'intéresser ce qui dépende de l'agent. “Ce qui dépend de l'agent" correspond aux choix que l'agent peut faire dans un contexte où il est en mesure de choisir. Dire ceci n'implique pas directement que l'agent se trouve en position de liberté bien qu'il soit possible de définir la liberté en terme de choix non contraint dans un contexte approprié.

À ce stade du débat nous considérerons donc que les agents cognitifs (les individus) sont doués de choix et qu'il leur est donné une situation de choix non contraint. Par “situation de choix non contraint" il faut par exemple imaginer qu'au moment du désert une corbeille de fruit est présentée à un agent cognitif est qu'il peut choisir parmi les fruits qui lui sont présentés ou s'abstenir de choisir s'il ne veut pas manger de fruit. Ces situations sont rares mais il en suffit d'une pour que le principe s'applique.

Reprenons la définition de l'identité telle qu'elle est donnée par Leibniz. Dans ce cas deux agents cognitifs ne pourraient être distingués l'un de l'autre s'ils partagent les mêmes propriétés, et amendons-la avec les éclaircissements que nous venons d'apporter:

deux agents cognitifs sont identiques si dans une situation de choix donné ils choisissent les mêmes éléments dans un menu donné dans une situation donnée.

Il faut retenir que l'identité n'est faite que relativement aux critères en question. Par exemple, dans la formulation du principe de Leibniz, x et y sont identiques en fonction de F, non pas de leur graphie par exemple.

Ici, deux agents seront les mêmes s'ils choisissent les mêmes éléments dans une situation de choix, leur identité ne se basera donc que sur ce choix et non sur des autres critères possibles.

Mais allons plus loin. Le choix est manifesté par l'élément retenu dans un menu, mais ce n'est là que sa manifestation. Si le choix est issu d'un processus cognitif qui prend en compte les attentes, les désirs, les plaisirs, les émotions ou toutes autres motivations, si deux agents systématiquement choisissent les mêmes éléments, alors il est possible de postuler que leurs motivations, quelles qu'elles soient sont identiques et donc que ces agents sont identiques.

Ce raisonnement devient vite captieux. D'une part parce qu'il n'est pas dû tout évident qu'un choix ne provienne que d'une seule motivation possible. D'autre part, si le choix est effectivement le critère, il n'est pas suffisant pour déterminer l'identité de l'individu.

Revenons pourtant sur cette définition de l'identité sociale: deux agents sont considérés comme étant les mêmes si et seulement si dans toute situation égale de choix ils choisissent systématiquement les mêmes éléments dans un menu.

Au lieu maintenant de nous intéresser aux individus eux-mêmes, intéressons-nous à la possibilité même d'une telle définition. Cela signifie que dans une situation de choix le choix soit effectivement possible indépendamment d'aucun caractère propre de l'individu. Si cette définition est appliquée à des individus en société, cela signifie que la société doit accorder dans une situation de choix la possibilité de choisir à l'individu indépendamment de tout autre caractère.

Défini en termes de condition sociale, la définition en question devient:

dans une société deux individus sont identiques si dans une situation de choix ils choisissent les mêmes éléments dans un menu indépendamment de tout autre caractère.

La notion d'identité devient on le voit quelque peu bizarre car rien n'indique qu'il faille confondre les individus pour qu'il leur soit possible de choisir les mêmes choses. Il suffit simplement de considérer que ces deux agents cognitifs sont égaux car ils bénéficient dans les mêmes conditions des mêmes choix de sortent qu'ils puissent choisir sans contrainte les mêmes éléments dans un menu donné.

Qu'en est-il de l'identité sociale alors?

Si l'on s'en tient à la version logique l'idée serait de confondre les individus en fonction de certains caractères avec le risque de chercher ou de déterminer ces caractères alors même qu'il est très difficile de les établir ou qu'il soit contestable et condamnable de le faire.

Si maintenant la notion est comprise en termes de choix et de possibilité de choix, l'identité devient simplement une égalité des chances ou une égalité des choix: notions beaucoup plus positives et facile à discerner, mais on le voit avec une responsabilité qui ne repose plus sur l'individu mais incombe à la société elle-même.

vendredi 20 février 2009

Une problème de communication

La crise économique frappe le pays et ça, tout le monde l'aura remarqué. Et quand certains économistes ou responsables politiques affirment que la crise est certes grave mais touche moins notre pays que d'autres, sans doute que sur la base de certains chiffres ils n'ont pas tort. Il est vrai que si la vie est chère elle reste possible et accessible et que si les loyers deviennent insupportables l'heure n'est pas encore à l'expulsion de logements impayés.

Mais cantonner la crise au simple niveau économique et financier serait commettre une erreur de jugement. La crise est sociale et, comme on l'entend parfois, morale. Mais le dire ne suffit pas.

Revenons un instant sur la question des universités et de leur réforme. Sans nécessairement faire le lien avec un précédent billet, l'université à grandement besoin d'être rénovée et les universitaires et les étudiants sont certainement les premiers convaincus. Il faut d'ailleurs se rappeler des propositions profondes de réformes qui avaient été proposées par les chercheurs eux-mêmes lors des dernières grandes manifestations. Les universitaires et le gouvernement sont donc d'accord sur ce point. Or cela ne marche pas, pourquoi?

La réforme proposée par le gouvernement n'est certes pas parfaite mais globalement les universitaires la rejettent alors même qu'ils pourraient l'amender et l'améliorer. Mais ils ne le font pas, vont à l'affrontement et cela permet encore une fois de crier sur leur dos en les taxant de conservateurs et de corporatistes.

L'erreur serait d'en rester là dans l'analyse, et c'est l'erreur qui est commise. Les millions et les milliards ne font rien et cette histoire, toute cette histoire, n'est pas une question d'argent. Qui prétend que le “pouvoir d'achat" de règle et se réglera uniquement en augmentant les salaires? Il y a aussi la solution de baisser les prix ou bien de donner “autre chose". Comparez simplement le goût du pain à prix égale, si la boulangère vous le donne avec le sourire ou pas. Comparez à salaire égale l'humeur de la caissière à qui vous dites bonjour et de celle à qui vous ne lui dites pas. Comparez le travail de la secrétaire avec qui vous êtes courtois et celle avec qui vous ne l'êtes pas. Ces différences sont énormes et colossales et pourtant si elles peuvent faire perdre beaucoup, rapportent peu et ne coûtent rien.

Le problème actuel est celui-ci. Le gouvernement parle de « mal être » ou de “malaise existentiel" lorsqu'il parle des événements qui se passent dans le DOM. Certes mais là aussi les mots peuvent dire tout et son contraire.

Le malaise est réel, palpable et maintenant visible dans la rue, c'est un malaise de reconnaissance, d'estime et tout simplement d'humanité. Les gens du commun ne sont pas aussi idiots qu'on ne voudrait le croire, ils savent pertinemment qu'il y a la crise et beaucoup acceptent de ne pas être augmenté ou même de sacrifier une part de leur salaire pour que leur entreprise passe ce cap. Ils continuent à consommer malgré les incertitudes parce qu'ils savent aussi que l'économie c'est eux, leurs actes et leurs actions. Ils travaillent dur et avec ardeur car ils savent qu'il faut se serrer les coudes dans cette mauvaise pas. Et s'ils font “moins" parfois, par exemple en ce qui concerne les dons aux associations caritatives, ce n'est pas faute de vouloir mais parce qu'ils ne peuvent pas autant.

Mais ce qu'ils ne pardonnent pas ou plus et ce qu'ils crient maintenant dans la rue c'est l'ignorance de ces petits efforts, l'indifférence à ces petits riens qui font que la vie est supportable et qui distingue l'existence de la survie. Si leur “bonjour" n'est plus retourné, s'il est maintenant facturé ou critiqué et bien ils ne le donneront plus, ne l'offriront plus et c'est là que le lien se casse et que la fameuse fracture sociale apparaît, car en définitive l'économie réelle n'est pas faite que de biens, de produits, de consommation et de pouvoir d'achat, mais avant tout de relations, de regards, de mots et de sourires.

Alors bien sûr le bienséant ricanera de la naïveté de ces propos et l'homme de soutane se revigorera qu'enfin on prône un retour aux bonnes vieilles valeurs morales, mais ces deux-là, comme les premiers, auront tort. Non, c'est beaucoup plus simple, pratique et pragmatique que cela, c'est tout simplement ce qu'on appel le bon sens.

À vouloir bousculer ce que le bon sens à mis tant de temps à transformer en sagesse quotidienne on récole son désarroi, sa colère et finalement on perd son estime. Et regagner le confiance est ce qu'il y a le plus dur, de plus difficile et de plus méritant. Mais c'est un travail que les deux parties doivent faire.

Lorsqu'il y a des décennies certains paradaient en réclamant du rêve il fallait être bien crétin pour demander combien ça coûte ou coûterait le rêve. Car les termes de valeur et de prix ne s'appliquent pas qu'à la monnaie ou à l'économie.

Tant que cela ne sera pas compris, d'un côté comme de l'autre, le dialogue sera sourd, le temps passera et le choc n'en sera que plus violent. Tout cela n'est qu'une question de communication, mais la communication, finalement est l'essence même de l'échange. Enfin, la bonne communication s'entend.

jeudi 29 janvier 2009

Communication visuelle: qu'est-ce qu'une image?

Lorsqu'on pose la question “une image, c'est quoi", on hausse les épaules. Une image, ça paraît simple, ça paraît évident, mais en fait pas du tout.

Déjà, il y a plusieurs types d'images et rien que ça suffit déjà à soulever la question. Quels sont ces différents types d'images, quelles sont leurs fonctions, quelles sont leurs structures?

Lors de la remise du prix Kodak, j'ai beaucoup entendu la question “mais c'est tout de même étrange de faire des paysages si petit et en format carré!". C'est étrange parce qu'un paysage c'est grand, c'est vaste, c'est ouvert, c'est horizontal, alors forcément quand c'est petit, restreint et carré ça choque. Et pourtant, et pourtant.
Je ne soulèverai pas la question de ce qu'est un paysage à proprement parler. C'est une question ouverte et les réponses sont si peu cohérentes qu'elle ne sera pas résolue de sitôt. Cependant, si l'intention est de retranscrire une notion d'espace et de dimension, il est possible de le faire en utilisant les plans, les échelles, les masses, les couleurs, les formes et les textures, et ces différentes composantes peuvent se combiner dans n'importe quel format du moment que cette intention est préservée. Il n'y a rien d'essentiel dans un paysage au sens où nécessairement un paysage devrait être carré. Il faut dissocier l'habitude qu'on a prise de voir des paysages horizontaux et les paysages eux-mêmes.
Cette remarque vaut pour toutes les facettes de l'image.

Dans le domaine de la communication visuelle, le problème devient criant. Par communication visuelle il faut entendre une communication qui utilise l'image comme support d'un message ou d'un contenu. La communication visuelle n'occupe donc qu'une portion du domaine de l'image. Elle se distingue notamment des images esthétiques ou psychologiques. Cette distinction s'opère à travers les jugements pertinents et opportuns sur l'image. Une image de communication visuelle doit être évaluée sur des critères de communication, une image artistique sur des critères esthétiques et ainsi de suite.

Le problème maintenant devient celui de la communication. Quel est le critère de communication? Celui qui me paraît être le meilleur est celui de la compréhension ou de la lisibilité. Avant tout une communication réussi si l'interprète saisi le message, le contenu, l'information ou appelez ça comme vous voulez, que le producteur, l'émetteur, le graphiste y a mis.
Une image de communication visuelle doit être lisible. Ainsi chaque élément représenté doit l'est en fonction de ce critère et donc servir à l'énonciation ou à l'expression du message, du contenu ou de l'information.

Différents types de contenus peuvent être exprimés et donc différentes formes visuelles doivent s'y rapporter. Sur cette base il est possible de dresser une typologie de l'image. Il y a des images narratives d'autres conceptuelles, certaines sont classificatoires alors que d'autres sont analytiques ou encore symboliques, et ainsi de suite.

Ces types se manifestent dans des représentations visuelles, des images, et donc la structure de ces images doit refléter cette typologie. À partir de là une sorte de vocabulaire et de grammaires de l'image de communication visuelle peut se mettre en place. Par grammaire ou vocabulaire il faut entendre des éléments distinguables agencés suivant des principes récurrents. Des formes, des masses, des textures, des intensités, des vecteurs, etc. Ce vocabulaire et cette grammaire deviennent particulièrement saillants et importants dans certains types de représentation, les cartes topographiques par exemple.

Ainsi les images se définissent ou plus exactement de caractérisent et par conséquent peuvent s'étudier et s'analyser. C'est sur cette base qu'une image peut-être plus lisible, compréhensible, prégnante qu'une autre et donc meilleure sur cette échelle de valeur. L'évaluation esthétique dans le domaine de la communication visuelle n'a aucune pertinence et ne peut remplacer des critères pertinents et appropriés.

Mais l'expérience me montre que mêmes les professionnels de l’image ne voient pas, ne maîtrisent ou ne comprennent pas ces notions, la question doit paraître alors bien byzantine et difficile à un non professionnel.

Une tache à laquelle il faut s'atteler!

lundi 26 janvier 2009

Qu'est-ce qu'un concept?

La question est évidemment théorique et la littérature abondante sur cette question. Mais elle se pose aussi d'un point de vue pratique, dû moins lorsqu'elle ne porte non pas sur la constitution ou la nature du concept, mais sur son rôle dans l'explication théorique par exemple.

Lors d'un dîner l'autre jour, une amie préparant une thèse de littérature me fait par de la remarque de sa directrice de thèse et de son désarroi: sa directrice trouve que sa thèse manque de concepts. Son désarroi tient au fait qu'elle cherche à expliquer un problème précis et pratique de traduction du théâtre et qu'elle trouve que toute la littérature “conceptuelle" sur la question n'apporte rien de bien clair et de bien utile. Le concept c'est flou, c'est vaseux et surtout ça ne permet pas de rendre compte des subtiles différences entre les différents extraits du corpus.

En un sens c'est vrai, en un autre non. C'est vrai au regard de ce que la littérature considère comme étant un concept, faux au regard de ce qu'est effectivement un concept.

Un concept, pour le dire rapidement, est une entité mentale qui permet de catégoriser, de classer l'environnement par un agent cognitif qui le possède. Le concept CHAISE par exemple permet à celui qui le possède de discriminer et d'identifier les chaises et donc de les distinguer des tables et des oiseaux. Le concept est considéré comme abstrait car valant pour toutes les occurrences susceptibles de tomber dans son extension. Le concept CHAISE est abstrait au sens où il vaut pour toutes les chaises sans qu'aucune ne l'épuise. Soit.

Mais il y a deux types différents d'abstractions: un premier type correspond à ce qu'on pourrait appeler une abstraction négative. Cette abstraction retire des traits particuliers à un élément pour ne retenir que les traits essentiels à une classe. Le concept CHAISE n'a pas de couleur puisqu'aucune couleur n'est essentielle à une chaise pour être une chaise, pas de hauteur, pas de forme, etc. si bien qu'on se retrouve en définitive avec un "couteau sans lame auquel il manque le manche", c'est-à-dire pas grand chose.

La seconde abstraction cherche à partir de rien à agréger ensemble les propriétés essentielles d'un concept. Donc ou bien le résultat est grosso modo équivalant à la première tentative soit la définition du concept est donnée intensionnellement (avec un S) c'est-à-dire fonctionnellement. ainsi une chaise sera "n'importe quel meuble sur lequel il est possible de s'asseoir, qui possède un dossier mais pas d'accoudoirs". Le concept est réalisé même si aucun élément ne tombe sous son extension.

Ces deux tentatives pour établir et définir le concept, l'une plus empiriste, l'autre plus idéaliste, manquent toutes deux leur objectif. Une manière de le comprendre est de proposer ces approches à l'amie en question: comment parviendra-t-elle à mettre plus de concept dans sa thèse? Si elle y parvient c'est par son tallent propre et certainement pas grâce à ce conseil.

L'écueil de cette approche par l'abstraction tient au fait que la fonction et l'utilité même du concept est oubliée. À quoi sert un concept? À penser, à catégoriser, à classer, à comprendre, à connaître, à juger. C'est-à-dire à rendre possible une lecture et une compréhension d'un domaine. Cette utilité, cette valeur pragmatique du concept est centrale et primordiale.

Lorsqu'on veut se repérer dans un environnement, un bon outil pour le faire est d'utiliser une carte. La carte montre, manifeste les points saillants de l'environnement en question, points qui peuvent servir de point de repère. Plus la carte à de détails plus le repérage est facile mais plus la lecture est longue et fastidieuse.

Ces cartes, rapportées au domaine cognitif sont les conceptions et les points de repères sont les concepts. Les concepts sont donc des points de repère qui permettre de comprendre, l'examiner, de classer, de catégoriser un environnement. Certains concepts sont bâtis d'après l'expérience, d'autres non.

L'idée n'est pas qu'un concept vaut pour toutes ses occurrences au sens ou chacune devrait pouvoir s'y superposer, mais le concept doit permettre de repérer ces éléments comme relevant de ce concept suivant ce point de repère en question.

Un même environnement peut être cartographié de différentes manières: une carte de la population, une carte des transports et une carte géologique peuvent représenter le même espace mais avec des points de repère différents. Il en va de même pour les concepts.

Potentiellement tout peut être un concept comme tout détail peut devenir un point de repère s'il est utilisé en tant que tel. Il s'agit alors de l'indiquer comme point de repère pour une compréhension, une lecture et de structurer l'étude à partir de lui, c'est-à-dire développer une conception adéquate et cohérente.

L'art de la cartographie est subtil et délicat, la lecture de ses produits, les cartes, nécessite juste de l'attention. C'est la même chose pour les conceptions.

Un concept est donc un point de repère dans une pensée au sens d'une analyse, une étude, une présentation d'un domaine. Il s'agit alors de délimiter ce domaine et l'explication qu'on entend en donner et d'exposer à l'aide des traits saillants et caractéristiques nécessaires, à savoir, les concepts, qu'ils soient abstraits ou non, nouveaux ou non, compliqués ou non.

[Thèse sur les concepts, Benjamin Sylvand]

lundi 19 janvier 2009

Dominique Dubosc: ciné-trace

L'autre soir (le 10 janvier), l'ETNA (atelier de cinéma/vidéo expérimental) fêtait Dominique Dubosc.

Le cinéma documentaire est extraordinaire par sa fonction même: il garde une trace, montre quelque chose qui déjà n'est plus là. Mais il serait illusoire de croire que le cinéma montre un “ça-a-été" comme le disait Roland Barthes, mais plutôt un regard. Ce qui a été n'est pas nécessairement ou seulement le sujet filmé mais plutôt le regard qui a été porté sur ce sujet. C'est ce qui fait toute la différence entre un documentaire et une caméra de surveillance. L'intention du regard est patente dans le film, est lorsqu'on voit "Les maîtres fous" de Jean Rouch ou "God's country" de Louis Malle, c'est plus Rouch ou Malle qui se manifestent à travers l'image qu'une pratique ou un quotidien. Paradoxalement donc les meilleurs documentaires sont ceux qui deviennent transparents et dont la technique s'efface au profit du sujet et lorsque cette fin est atteinte le regard du cinéaste emplie pleinement l'écran et son point de vue devient incontournable.
Qui d'autre que Malle aurait pu faire émerger cette Amérique ou que Rouch cette Afrique?

Les films de Dominique Dubosc sont de cette trempe-là et "Réminiscences d'un voyage en Palestine" par exemple nous présente un regard singulier sur cette partie du monde qui raisonne d'une manière toute particulière avec l'actualité du moment. Mais si les films de Dominique sont beaux et puissants ce n'est pas parce qu'ils sont actuels mais parce qu'ils sont singuliers. Il montre à travers une certaine banalité toute la poésie qui habite un lieu et un moment. Les traces sont ténues et passagères, certaines ont déjà disparu mais le regard retrouve à travers elle des brides signifiantes qui éclairent le monde. Un char qui passe et ce sont toutes les craintes qui remontent. Une file d'attente à un point de passage et tout le poids de la recherche d'un travail, le désœuvrement qui transparaissent.
Ces souvenirs qui écrivent les lieux et les instants sont ceux que l'on dessine pour se remémorer comme sont ces endroits et le parallèle même dans le film entre le film et le dessin est plus qu'éclairant.

Mais les films de Dominique Dubosc ne sont pas nostalgiques. Ils ne revendiquent pas un passé ou une histoire. Ils sont plutôt des rêveries similaires à celle que l'on peut faire en regardant par la vitre d'un train ou d'une voiture d'un voyage trop long. Ses films sont une poésie réaliste de l'instant qui font ressortir tout ce que les images peuvent contenir même dans leur apparente banalité.

Le travail du cinéaste est de ciseler le regard et l'image pour montrer ce qu'ils contiennent et Dominique Dubosc le fait admirablement bien. C'est un cinéma simple et puissant de la trempe de Malle et de Rouch. Un cinéma rare et précieux.

(Le site de Domnique Dubosc)

Montage: écriture ou assemblage?

Le montage audiovisuel est-il une forme d'écriture ou simplement un assemblage?

Limitons la question à un domaine plus restreint et ne parlons que du montage de film documentaire.

En un sens le montage n'est que l'assemblage d'éléments déjà écrits à la fois visuellement car déjà filmé et intentionnellement car déterminé par le choix de la prise de vue. Le montage se résume alors retenir certains éléments filmés et a les assemblés d'après l'intention originelle. Le montage est donc une mise en forme, un assemblage comparable à la mise en page d'un texte. C'est la conception classique et canonique du montage filmique.

Or le montage, comme d'ailleurs toute phase de réalisation d'un film, permet une expression qui peut radicalement modifier l'intention d'un film. L'ordonnancement des plans et des séquences est complexes et une analyse approfondie fait ressortir que les mêmes plans ordonnés différemment peut modifier considérablement la lecture des images. L'effet Koulechov n'en est qu'un exemple parmi d'autres.
L'agencement des photogrammes, des plans et des séquences est déterminé par plusieurs facteurs liés à la lecture des images par exemple à travers la cohérence à l'intérieur des images (le cas des jump cut ou match cut) avec la position spatiotemporelle des éléments mais aussi à travers le propos général du film. C'est justement sur le propos général du film que se pose la question de l'intention, c'est-à-dire du propos exprimé que le montage peut jouer un rôle.

Si le montage n'est qu'un agencement de plan déjà constitué, alors cela signifierait ou bien que la signification se trouve à l'intérieur même du plan et donc que sa position dans la séquence ne l'affecterait pas, ou bien que la forme générale du film n'influe par sur sa signification. L'agencement ne serait dicté que par les lois extrinsèques liées à des questions esthétiques notamment. Cette conception atomique de la signification filmique tend à considérer que l'importance est plus dans l'effet produit esthétiquement chez le spectateur que dans une compréhension intentionnel du film.
Si la forme importe, cela signifie que la signification se situe à un niveau plus moléculaire, ce qui n'exclue pas une signification dans l'image, et que la combinatoire détermine le propos général. Un même plan peut donc être porteur de signification selon le contexte dans lequel il apparaît sans nécessairement être neutre isolément.
L'ordre des photogrammes, des plans et des séquences s'apparenteraient plus à la structure argumentation d'un texte que de sa simple mise ne page.

Dans le cas spécifique du film documentaire entendu au sens de construction d'une structure audiovisuelle en vue de montrer quelque chose, c'est à dire pas simplement un film illustratif mais bien la présentation d'un propos, le montage peut jouer un rôle central dans l'écriture du film. Porté à son paroxysme cette idée est celle qui régie le found footage.

Certes le montage ne peut-être que l'assemblage d'images filmées d'après un plan très détaillé de tournage lui-même établi sur un script bien ficelé, mais ces conditions sont trop rares et exceptionnelles pour se trouver facilement lorsqu'il s'agit de filmer un documentaire. C'est en ce sens que le montage est, ou peut être une écriture filmique.

lundi 5 janvier 2009

David Falco remporte le Prix Kodak de la Critique 2008



Cette année le Prix Kodak de la Critique Photographique souffle ses 33 bougies, parmi les 55 dossiers en compétition, le jury a récompensé le travail réalisé par David Falco, pour sa série Spitzberg, 78, 15°N 16°E #2. Christophe Agou se voit remettre le 1ère mention spéciale, et le travail de Kosuke Okahara, la seconde mention spéciale.

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© David Falco


Comme chaque année, le jury du Prix Kodak de la Critique Photographique 2008 était composé de professionnels de l’image reconnus, apportant chacun un regard personnel afin de récompenser le travail d’un photographe professionnel. Cette année le jury était composé de :
Patrick Codomier (Directeur du Département Média de l’agence Vu), Guillaume Cuvillier (Rédacteur en chef du magazine Le Photographe), Chayan Khoi (Photographe professionnel), Romain Lacroix (Chef de service adjoint photo du magazine Paris Match) et Guillaume Rivière (Photographe Indépendant).

David Falco, lauréat du 33ème Prix Kodak de la Critique Photographique.
Né le 23 novembre 1978, David Falco fait ses Études à l’Ecole Supérieure des Beaux Arts de Montpellier et en ressort avec les félicitations du jury pour son travail plastique et photographique. Bibliothécaire à la Maison Européenne de La Photographie, il y découvre la richesse du fond et en particulier les photographes et éditions japonaises. En 2002, la rencontre d’un photographe de mode l’amène à travailler dans un studio parisien renommé, comme assistant de plateau puis comme opérateur numérique.
En parallèle et depuis 2003, il voyage avec l’écrivain et philosophe Benjamin Sylvand, notamment dans les régions polaires.

Le travail primé: « Série Spitzberg, 78, 15°N 16°E #2 »
Cette série de photographies est le second volet d’un travail réalisé au Svalbard, archipel norvégien situé dans l’océan arctique. David Falco et Benjamin Sylvand poursuivent une réflexion sur les relations au monde et en particulier l’appréhension de l’espace, de la nature et du paysage.
Textes, photographies et depuis peu l’ébauche d’un film construit sur le rythme de la marche se rapportent à différents aspects d’une même expérience.
Les régions arctiques sont fascinantes non seulement par leur beauté mais aussi par le décalage entre ce qu’on s’attend à voir et ce que l’on peut y voir réellement. L’espace est différent de l’espace habituel, les distances sont improbables, les cartes approximatives, le jour permanent brouille la notion de temps. Il y a peu ou pas de repères, pas même un arbre pour estimer l’étendue du paysage représenté et si on ne cherche pas une autre lecture de l’espace, de la couleur, de la matière et des formes on s’y perd.
David Falco exprime à l’aide d’un travail minutieux de retouche et de composition un mélange entre ses souvenirs et ce qu’il a vu là-bas. Il compose des série de diptyques, triptyques et d’images seules qui se déploient en courtes séquences.

C’est ce travail « Série Spitzberg, 78, 15°N 16°E # 2 » de David Falco que le jury a choisi de primer dans le cadre du 33ème Prix Kodak de la Critique Photographique. Le jury salue ainsi le remarquable travail sur le rapport de l’espace et de la matière et insiste sur le sens qui se dégage de ces photographies. « Une série très poétique, très aboutie » et « de très belles images qui fascinent et nous déséquilibrent ».

(Communiqué de Presse Kodak)

lundi 6 octobre 2008

Marie-Claude Lorne

À la demande d'universitaires français il m'a été demandé de ne plus faire le rapprochement entre la tragique disparition de Marie-Claude Lorne et une critique du système universitaire français et donc de supprimer le message qui se trouvait ici.

Ceux-ci m'assurent par ailleurs qu'aucun dysfonctionnement n'était à déplorer dans cette triste affaire (comme dans aucune autre par ailleurs) et que toute la lumière serait faite sur ce cas.

J'ai le cœur gros à la disparition d'une amie dont je garde un souvenir vif, pleine de vie et de projets qui avait caressé le rêve de pouvoir enfin avoir le droit de faire le métier qu'elle aimait.
Je garde d'elle le souvenir de repas à la maison et de discussions sans fin, de sa culture et de la vivacité de son esprit qui ne pouvaient laisser indifférent ainsi que son rire si communicatif.

La dernière fois que nous avons discuté ensemble elle m'avait dit avoir l'impression d'être une Don Quichotte se battant contre des moulins. Une bourrasque l'aura emportée.

dimanche 7 septembre 2008

Une grammaire du paysage

Le paysage n'est pas naturel. Dire cela n'est pas dire qu'il n'y a pas de paysage sans Homme, même s'il est vrai qu'au sens premier le paysage est dessiné par le paysan qui aménage l'espace et la nature. Ce n'est pas non plus extrapoler la maxime cartésienne de s'en faire comme maître et possesseur. Non, dire que le paysage n'est pas naturel c'est en fait dire que sans compréhension, sans appréhension, sans lecture de paysage comme le paysage n'existe pas.

L'idée n'est pas non plus de soutenir que nous avons un accès à la Nature indépendamment du paysage. Le paysage est à la nature ce que le phénomène est au noumène. C'est le seul accès que nous en avons.

La lecture de la nature comme paysage est un phénomène si courant qu'il en devient transparent, sauf, évidemment dans ses retranchements. Regarder à travers la vitre de la fenêtre d'un train c'est voir une campagne de dérouler, une ligne d'horizon hérissée de clochers pareils à des mains pointant vers le ciel, c'est voir des troupeaux de bosquets et des tapis de forêts entre des parquets de parcelles labourées, des coutures de routes serpentines, des coulures d'un ciel juste nettoyé. Cette lecture du paysage est aussi transparente que la lecture d'un livre ou d'un roman.

Mais la lecture exige des savoirs et des compétences aussi bien qu'elle exige de les dépasser et de ne plus les voir ou s'en apercevoir. S'il est possible de manier parfaitement une langue ou un langage sans être capable d'expliciter les règles qui le gouverne il n'en reste pas moins que des règles le régissent.

Dans certaines conditions ces règles sont mises à rude épreuve. Dans certains coins les paysages sont si abstraits, si poétiques, si épurés, si directs, si sobres, si simples que leur lecture en dévient aussi complexe qu'un poème ou une peinture abstraite.

La principale difficulté peut-être, celle qui se remarque en premier est celle qui concerne l'échelle. Lorsque les rapports de grandeurs ne sont pas directement donné le regard se perd et cherche, perdu comme un appareil photo qui ne serait sur quoi faire la netteté. L'échelle d'un paysage est le plus souvent contenue et donnée dans celui-ci; c'est un arbre, un homme, une voiture ou un bâtiment. À partir de ce repère tout se calibre et se toise. Le ciel devient immense ou minuscule et le regard n'a qu'à suivre ces indications pour comprendre et voir. Mais lorsqu'il n'y a rien, ni arbre, ni homme, ni véhicule ni bâtiment, un simple cailloux peut devenu une falaise, une poussière un désert, un ciel un univers, le regard se perd et s'accroche désespérément à tout ce qu'il peut pour s'en faire un repère pour arpenter l'espace et la nature.

Regardez les photos prises par les sondes sur Mars ou la Lune. Quel champ et quelle surface l'image montre-t-elle? Est-ce une immensité ou un espace aussi petit qu'un bac à sable? Sans repère une ombre peut devenir un homme, un cratère une emprunte.

D'autres éléments structurent de manière essentielle le paysage: son horizon, son orientation, ses formes, ses textures, ses couleurs ou encore son époque et sa temporalité. Ces marques forme un lattis réticulaire sur lequel l'interprétation peut s'accrocher et s'arrimer comme à une sorte de grille de lecture. Ces éléments sont interconnectés et s'informent l'un l'autre de sorte qu'à partir d'un fragment il est possible de reconstruire l'ensemble. C'est en cela que c'est une grammaire du paysage.

Grammaire car comme un langage le paysage est une interprétation, une partition et un découpage de l'environnement du monde. Il faut donc qu'il y ait un monde à interpréter, le paysage n'est pas une illusion ou un fantasme, mais il faut également qu'il y ait une lecture de ce monde et donc un lecteur. Le paysage est une relation entre un environnement et quelqu'un qui l'arpente. Cet arpentage se fait par le regard, qu'il soit fixe ou mobile. Ce regard est stimulé par le monde, vient de l'observateur vers le monde qui l'informe et l'oblige à s'ajuster jusqu'à ce que finalement un point de focal apparaisse et permette de le voir. Cette mise au point est l'ajustement de tous ces paramètres qui, nous l'avons dit, sont en équilibres communs et donc s'informent les uns les autres. Une fois l'échelle trouvée, l'horizon apparaît et avec lui les formes et les textures et ainsi de suite.

Lire un paysage c'est maîtriser cette grammaire, c'est savoir l'utiliser et l'employer, cela passe par une éducation du regard, c'est en cela que le paysage n'est pas naturel, au sens ou il n'est pas inné, et c'est cela qu'il faut apprendre et enseigner.

vendredi 29 août 2008

Paradoxe de l'image filmée: la difficile simplicité.

Le statut de l'image est particulier dans notre société. Elle a valeur de témoignage et sa “vérité" est plus “directe" et “authentique" que tout autre. Ainsi un documentaire audiovisuel est souvent jugé plus fiable qu'un article de journal ou qu'un reportage radiophonique. D'un autre côté les gens ne sont pas dupes non plus et “savent", tout du moins fantasment, que l'image peut être truquée et trafiquées, mais plus que l'image elle-même c'est ceux qui la font qui seront alors mis en cause.

Certes l'image peut tromper comme elle peut dire la vérité. En fait l'image, comme n'importe quel autre support en dit rien d'autre que ce qu'elle véhicule. La vérité n'étant que la valeur d'une proposition, que celle-ci soit orale, textuelle ou visuelle cela ne change rien.

Sachant cela l'image animée n'est pas différente de n'importe quel autre moyen de relater des faits. Je dis des faits comme entités minimales de réalité, que celle-ci soit fictionnelle ou non.

Le paradoxe qui se pose alors est celui de l'utilisation de l'image dans le cadre des sciences humaines, sociales et cognitives. D'une certaine manière l'image rend directement accessible des événements, des faits, qui jusque là ne passaient que par le texte et le dire. La temporalité est différente, mais surtout la distance temporelle entre le fait et sa relation.
L'image filmée transporte en quelque sorte le fait avec elle-même alors que le texte ou de discours s'en éloigne toujours plus ne conservant que l'image cognitive: l'interprétation et la mémoire. En ce sens l'image serait un meilleur vecteur de vérité que le texte ou la parole. Filmer un événement permet de revenir “directement" sur lui alors qu'il est parfois difficile de retracer ce que fut “vraiment" cet événement en croisant des sources textuelles ou langagières.

Mais d'un autre côté les images “brutes" ne sont pas différentes des notes que prend l'anthropologue ou le philosophe lorsqu'il mène sont enquête. Ces notes ce sont des faits, des informations, des descriptions, des sensations, des références qui forment un amas accumulé que le chercheur doit ensuite organiser et structurer. Cette organisation et cette structuration n'est pas simplement un arrangement mais c'est surtout un tri, un recoupement, une synthèse. Il ne s'agit pas de tailler dans le gras et de passer la moitié de ces notes par dessus bord, mais de dessiner entre elles des relations qui permet de le regrouper en principes plus abstraits qui organisés composeront une théorie: théorie qui explique et rend compte de la situation, c'est la clé qui permet d'y voir plus clair et d'y comprendre quelque chose. Ce travail de synthèse et d'abstraction est aussi, sinon plus, difficile que le travail d'observation et de glanage d'information. Chez le chercheur ce travail est son travail, il vise directement et volontairement à la théorie. Mais ce travail de maturation peut se faire de manière plus indirecte et détournée par croisement de sources, passage de témoin et division collective du travail de mémoire en passant d'un conteur à un autre, d'une génération à une autre, d'un orateur à un autre. C'est pour cela que les contes, légendes, articles de journaux sont si importants, c'est que leurs structures même de production agissent comme autant d'alambics qui distillent l'humeur et la vapeur des faits tels qu'ils sont compris et qui en définitive donnent un concentré de la géographie conceptuelle et mentale de ceux qui les pensent. Ce processus est équivalent à celui de la théorie, à ceci près qu'il peut resté implicite dans une communauté, ce que le chercheur cherche à révéler.

L'image en elle-même n'est qu'un fait parmi d'autre. Le risque est de les accumuler ad nauseam jusqu'à les rendre tout à fait indigestes et incompréhensibles.

Le mal inverse serait de conclure à l'inaptitude de l'autonomie de l'image et de systématiquement la monter de manière narrative ou bien de lui adjoindre une voix off, une explication, un commentaire ou une illustration.

Si l'image filmique est comparable à une note alors son mode de réalisation doit être similaire à celui de la prise de note. Prendre une note est quelque chose de plus difficile qu'il n'y paraît au prime abord, cela demande de l'expertise et du savoir faire: savoir quoi prendre en note. L'anthropologue ou le philosophe est un être humain comme tout autre est pareillement est soumis à un flot constant et continu de faits, cependant il n'en note que certains: ceux qui sont pertinents pour son enquête et sa recherche. Un tri et une sélection s'opèrent donc déjà dans le choix du fait. Ensuite la note est synthétique, elle ne rend que certains traits caractéristiques du fait, ceux pertinents eux-aussi pour l'enquête. Ensuite ces notes elles-mêmes seront retravaillées et ainsi de suite.

L'image est donc similaire. Elle doit être pensée dans une optique particulière avant que d'être faite. Il serait tout aussi faut de dire que l'image est objective que de dire qu'elle est vraie. Cela ne signifie pas pour autant qu'elle soit subjective ou fausse, ces valeurs, je le répète, n'étant que des propriétés de proposition. Une image peut-être vraie ou fausse comme objective ou subjective, ce qui importe est ce qu'elle montre de la manière dont elle le montre.

Le cinéma vérité ou objectif n'existe pas en soi. Cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas se faire ni se construire.

Le paradoxe que doit surmonter ce type d'image animé est qu'à la fois elle doit rester un fait tout en même temps qu'être un regard, un parti pris, une interprétation de celui-ci. Cela revient à vouloir prendre la note parfaite sur le terrain, celle qui ne sera pas modifiée par le processus de théorisation. C'est à la fois l'immédiat et l'absolu, le concret et l'abstrait. Ce n'est pas impossible c'est ce qu'on appel des idées ou des concepts, mais c'est très très très difficile à faire. Less is more, mais c'est évidemment là toute la difficulté.

Celui qui voudrait pendre des images au lieu de penser en se disant que ce sera plus sûr et plus facile se trompe lourdement.

mardi 26 août 2008

Le temps et la question de la propriété réelle des biens fondamentaux

La littérature sur le temps abonde et toutes les argumentations ont sinon été bien épuisées au moins été abordées quant à la défense d'une temporalité cyclique, elliptique ou linéaire.

Lorsqu'on aborde la question du temps vécu il est impossible de ne pas considérer la représentation de l'existence par l'agent dans la temporalité. Pour le dire d'une manière un peu brutale, l'agent cognitif se moque passablement de ce qui ne l'affecte pas d'une manière ou d'une autre. Le temps sera donc considéré avant tout comme une dimension dans laquelle des possibles accessibles à l'agent peuvent advenir qu'ils soient déjà advenus, qu'ils auraient pu advenir, qu'ils adviennent ou pourraient advenir. Cette accessibilité de possibles est ce que les existentialistes appelaient le pro-jet, ou pour le dire plus simplement le projet, c'est la question que l'on pose à l'enfant ou au chômeur “alors, que vas-tu faire de ta vie?".

On pourrait penser que le projet s'inscrit dans la temporalité. C'est parce qu'il y a un futur qu'on peut demander ce que l'on fera dans quelques années, sans se départir tout à fait d'une notion linéaire de projet, mélange hérité de la chrétienté et des Lumières.

Le projet est en fait indépendant de la temporalité, du moins il peut s'en dissocier. S'il est vrai qu'il est possible de rendre compte de notre vie mentale en terme de continuité linéaire tendant vers un progrès, il est également possible de rendre compte d'un mode de vie dans lequel le projet ne serait pas une projection dans l'avenir et tendant vers un but, mais comme le déroulement de repaires. Cette forme de temporalité est cyclique mais non pas au sens d'un éternel retour mais plutôt de celui du cycle des saisons. Les saisons reviennent périodiquement sans jamais être vraiment les mêmes. Ce sont des repaires comme les repas, les nuits ou les périodes de sommeil peuvent être des repaires.

Le drame d'une partie de la société est qu'elle se cale sur cette forme de temps alors que la majorité fonctionne sur un point de vue linéaire progressiste. Cette frange de la population est dé-socialisée car ne joue pas le jeu, par exemple elle ne cherche pas à gagner de l'argent, à s'établir, à obtenir une meilleure position sociale ou à préserver ses acquis. Non, elle vie dans une sorte de présent mais qui lui-même est distendu. Ce n'est pas un présent au sens d'un ‘moment' ou d'un ‘instant' comme le préconise le carpe diem, mais c'est un flottement durant lequel se réalise un laps entre deux repaires: entre manger et dormir par exemple; un entre-deux. Le temps est dilaté en fonction de ce qui l'occupe et du monde d'activité, il peut être extrêmement distendu comme nous le rapporte les relations de voyage dans les régions polaires par exemple. Je me souviens d'un passage de Nansen lorsqu'il est coincé avec un coéquipier sur l'archipel François Joseph et qu'il raconte que ce qu'il prenait pour des journée s'étalait en fait sur des plusieurs dizaines d'heures et qu'en définitive une journée pour eux finissait par durer 72 heures, les repaires telle que l'alternance jour/nuit n'étant pas présente dans ces régions.

Le même phénomène peut advenir sous nos latitudes et se traduisent par des cycles perturbés du sommeil, des insomnies, des cycles déréglés d'alimentation, des difficultés de concentration, des comportements violants ou au contraire trop calmes, bref autant d'attitudes qui ne conviennent pas trop à une vie en société.

Mais si ces modes de vies sont condamnables ce ne peut être que sur une base de santé de l'individu. L'expérience involontaire de Nansen, qui a plusieurs fois été depuis refaite en particulier dans des grottes, montre qu'il est tout à fait possible de vivre normalement sur d'autres repaires et même faudrait-il peut-être dire, sur des repaires propres à l'agent cognitif, entres autres, les fameux cycles biologiques. En ce sens ce n'est pas condamnable rationnellement.

Il est fort probable que la majorité des personnes dé-socialisées soient en fait parfaitement “normale" au sens psychologique et médical du terme, bien qu'elles ne s'accordent pas avec le rythme de vie “imposé" par la société. Certains choisissent volontairement un mode de vie décalé alors que d'autres en sont victimes, réduites à s'écarter de la norme car incapables de s'y plier.

Mais si une telle perception et conception du temps ne collent pas à une société branchée sur la linéarité vers un mieux, cela ne signifie pas pour autant qu'elle soit négative. Si l'existence n'est plus pendue à un bâton et une carotte elle peut s'avérer plus créatrice, contemplative ou simplement moins stressante, mais ceci, évidemment, si elle n'est ni jugée ni comparée à une norme sociale. Or c'est le propre de la vie en société que d'ériger des normes et des diapasons.

La question qui se pose alors est celle de la possibilité réelle qu'une vie en société pour tous les êtres humains. Si de manière prescriptive il est concevable que tout être humain vit ou doit vivre en société, de manière descriptive on voit que cela n'est pas si simple. Les raisons peuvent être multiples: peut-être que tout être humain prend pas à une société uniquement si celle-ci est parfaite, ou bien peut-être qu'essentiellement certains ne peuvent pas vivre en société, ou bien encore, peut-être que tout être humain doit et peut vivre en société mais que celle-dit doit laisser une place à certains qui n'y prennent pas part directement. Forme d'associable sociablité rousseauiste.

L'inconvénient dans notre société française actuelle est que la prédominance de la linéarité progressiste alliée à une notion de responsabilité individuelle mêlée de destin et d'autonomie conduit à considéré chacun comme responsable de sa situation et qu'il ne mérite que ce qu'il a. Ainsi un sans domicile fixe sera tombé dans la panade par dépression nerveuse, aléas économique ou décision personnelle mais quoi qu'il arrive a toujours la possibilité de s'en sortir. Si en un sens c'est vrai ce n'est pas pour autant facile.

Une situation d'échec sans perspective peut conduire ou bien à une dépression carabinée pouvant aller jusqu'au suicide, ou bien à un structuration différente du mode de vie sur des repaires accessibles, le monde des possibles ayant changé avec la situation. Imaginons quelqu'un qui pour une raison ou une autre se trouve en difficulté sociale, c'est-à-dire qu'il ne peut plus suivre la course effrénée vers le progrès et le mieux dans les limites des heures et des journées imparties et qui pour une raison ou une autre au lieu de sombrer dans des idées noires restreint le champ de ses possibles accessibles à une liste modeste et réaliste. Sa vie va devenir morne au yeux de certains mais réglée et sûre en réalité, tout comme l'étaient les journées de Nansen sur son archipel. Manger, dormir, marcher. Rien de palpitant, des habitudes, des répétitions de la même chose, des repaires stables et immuables. Un tel être humain pourrait vivre des années sans même s'en apercevoir et vivre très bien d'un point de vue mental et médical, sans jamais sombrer dans la folie et même en pouvant développer une imagination débordante. Remettre un tel être humain dans le “droit chemin" de la “société moderne" serait particulièrement difficile voire tout à fait impossible, mais il n'en reste pas moins qu'une telle personne pourrait-être heureuse et épanouie au sens de l'individu au moins. Et pourtant une telle personne viendrait certainement à dépérir assez rapidement et à frôler la folie par un état sanitaire délicat: la crasse, la malnutrition et les maladies en aurait vite raison.

Or ces raisons sont contingentes et il faudrait remettre les choses dans leurs contextes pour être honnête. Avez-vous déjà essayé de vous laver dans une grande ville comme Paris lorsque vous n'avez pas de logement ni trop d'argent à dépenser? C'est possible mais difficile. Pareil pour manger. Pareil pour dormir au sec. Ces conditions de vie ne sont pas des conditions “normales" parce la société telle qu'elle est organisée les accapare pour les intégrer à son propre mode de fonctionnement. À l'État de Nature, si jamais, un tel individu pourrait vivre d'eau fraîche et de verdure. Or ce sont des denrées disparues de nos villes et même peut-être de nos campagne.

La société pourrait fonctionner en laissant des espaces disponibles pour des actions simples et vitales sans nécessairement devoir “assister" ceux qui les fréquentes. Des fontaines par exemple, des bains publiques et peut-être même des cantines. Sacrilège me criera-t-on, ça ne ferait que ruine l'économie et voler les justes propriétaires de ces richesses au profit de parasites. Certes, c'est là que le bât blesse. Le bât blesse parce que l'eau est devenue une propriété de certain, que l'espace est devenu une propriété de certains, que la nourriture, l'abris et même le temps sont devenus la propriété de certains.

La question qu'il faut se demander alors, en ce début de XXIe siècle et avec les bonnes intentions morales, écologiques, humanistes et humanitaires que notre société veut bien se donner, est celle de la propriété réelle de certains biens. L'eau doit-elle appartenir à Véolia ou bien à l'humanité? Et ce pour chacun des biens premiers. Si on accorde à certain la possession de ces biens, alors il est juste de reconnaître qu'ils peuvent en être dessaisis et destitués par d'autres. C'est ce qu'on appelle une guerre comme celles qui nous attendent au sujet de l'eau. Si au contraire on considère que ce sont là des biens qui appartiennent à l'humanité en propre et donc à personne en particulier alors chacun y a droit dans la mesure de ses besoins (ce qui ne signifie donc pas de manière équivalente mais bien égalitaire), et si ces biens coûtent alors chacun doit y participer à la mesure de ses possibilités (qui ne correspondent pas nécessairement à ses besoins). Ainsi chacun, même un SDF a le droit (au sens de devrait avoir le droit) de se laver dans des bains publics, d'être soigné dans des dispensaires, etc. Nous verrions alors que d'autres modes de vie seraient non seulement possibles mais auraient leur pleine place et part dans la société car ce sont en définitive comme cela que vivent les artistes, les penseurs et les inventeurs, lorsque par chance ils peuvent subvenir à l'existence avant que de vivre.

La moralité de cette histoire? C'est que peut-être l'homme qui au coin de la rue demande une pièce pour manger vit mieux que celui qui la lui donne, “vit mieux" au sens où il sait pourquoi il vit et ce qu'il vit (le fameux bonheur espéré de nos société). -Finalement peu sont ceux qui ont vraiment un projet de vie, beaucoup moins nombreux en tous les cas que ceux qui pensent en avoir en fuyant continuellement ce qu'ils auraient espéré avoir...

Une meilleure société reste encore possible, c'est toujours bon d'avoir de l'espoir.

dimanche 24 août 2008

La question écologique: réalité des comportements et quotas de bonne conscience

L'écologie est l'une des préoccupation centrale et majeure de ce début de siècle. La prise de conscience qui était dénigrée dans les années 70 pour devenir une noble cause de chevalier isolé avec Cousteau, est maintenant devenue une politique de gouvernement. Alors qu'il s'agissait il y a 30 ans d'une position philosophique de laisser une planète aussi bleue à l'humanité de demain puis avec le commandant de laisser une planète à peu près bleuté à nos petits enfants, il s'agit maintenant de nos enfants ou bien de notre propre retraite. L'échéance se rapproche rattrapée par des conclusions alarmistes de fins des temps ou de catastrophes millénaristes et de rapports du GIEC.

Dans ce contexte où nul ne peut se détourner de cette question sans être taxé de cynique ou pire de criminel contre l'humanité, les comportements ne coïncident pas toujours avec les principes et les idées. La télévision diffuse au moins plusieurs fois par semaine des reportages qui nous démontrent combien l'agriculture est mauvaise lorsqu'elle utilisent des pesticides et des OGM et combien il est plus moral de changer sa manière de consommer en sauvant les petits producteurs contre les méchantes multinationales. Tout cela est louable, mais l'affaire est légèrement plus compliquée que cela.

J'en reviens à l'exemple de l'éco-taxe mise en place par le gouvernement. Taxer les produits les plus polluants est une bonne chose, quoi que. Je dis quoi que parce que ou bien ces produits sont nocifs pour l'environnement en ce cas il ne faut pas se contenter de les taxer mais il faut aller plus loin et les éliminer. Sincèrement à quoi sert-il d'avoir un 4x4 ou une voiture de plus de 3ch en ville? Je veux bien que dans certaines circonstances il soit nécessaire ou simplement utile d'avoir une grosse voiture, mais ces cas restent exceptionnels et devraient le rester. Donc ou bien on les taxe vraiment au point de dissuader radicalement le péquin d'en acheter ou bien on ne fait rien. Une mesurette n'est là que pour se donner bonne conscience sans trop se poser la question de ce qu'il adviendrait vraiment de l'industrie automobile si les mesures étaient plus réalistes et pertinentes.

Mais ce n'est pas là que le bât blesse. Le pire est de subventionner les produits qui (soit disant) sont plus "verts". Vous achetez une voiture qui pollue un peu moins qu'une autre alors vous avez doit à une prime. Soit. C'est un peu comme si vous donniez un bonbon à votre enfant à chaque fois qu'il dit bonjour à son institutrice. C'est bien de l'encourager, mais n'est-ce pas là le comportement normal qu'il devrait avoir sans devoir être récompenser pour cela? Si on lui frappe sur les mains à chaque fois qu'il lui donne un coup dans les jarrets au lieu de la saluer et lui donne un bonbon à chaque fois qu'il dit bonjour cela signifie que le comportement "normal" est celui consistant à rester indifférent et à ignorer l'institutrice? Excusez mais je crois que ce n'est pas une bonne chose. Le comportement normal devrait être celui de saluer poliment, pour une voiture de ne pas polluer ou de polluer le moins possible, pour une agriculture de détruire le moins possible l'environnement et ainsi de suite.

La prime fonctionne ici comme une emprunte négative sur les comportements, elle incite à penser "tiens, je ne ferais pas ça mais comme j'y gagne à le faire autant le faire", donc l'action n'est pas faite pour elle-même mais par incitation déguisée. Enlevez la prime et vous verrez quelle est la conscience réelle du consommateur en matière d'écologie.

Changer l'apparence ne suffit à changer l'essence, or la conscience écologique n'est louable (et même pas puisqu'elle devrait-être naturelle étant le meilleur comportement rationnel) que si elle est sincère et désintéressée (au sens où elle n'est effectuée qu'en suivant l'ordre des raisons et non pas par cupidité).

L'écologie est notre mythologie contemporaine. Notre raison de vivre. Nous travaillons pour sauvez la planète, du moins nous aimerions bien mais nos préoccupations personnelles et quotidiennes nous ne nous le permettant pas, nous espérons chaque matin que le gouvernement s'en charge, qu'une équipe d'éminents scientifiques s'en occupent, qu'un génie trouvera enfin l'équation magique "maximum d'énergie = 0 déchet", et se faisant nous continuons à utiliser notre vieille voiture, à jeter des emballages inutiles, allumer toutes les lampes et manger des tomates rouges aux hormones, parce que nous pouvons pas nous permettre mieux. Il y a donc le mythe général d'un côté et l'action personnelle de l'autre et, pour le moment, une inadéquation entre les deux. Nous voulons faire quelque chose pour participer à cette belle aventure et cependant nous le faisons pas parce que la réalité est différente. Or il n'y a d'autre réalité que celle des actions individuelles, et même si l'action générale n'en dépendant pas directement, elle y est conditionnée en fin de compte car il n'y a pas d'abstraction sans un monde concret ne serait-ce que pour la penser.

La raison impose donc de modifier les comportements réels et concrets plutôt que les idées creuses et générales. C'est plus simple mais plus brutal également. Les révolvers tuent? Cessons de construire des revolvers et interdisons-les. Les grosses cylindrées polluent, arrêtons d'en faire et de les utiliser... la première source de pollution en France vient de la mauvaise isolation des logements? isolons-les ou reconstruisons les. C'est simple, mais vous voyez la dose de courage qu'il faut pour agir...

Ma foi tant que la Terre le permet nous pouvons continuer sur la voie de la facilité en nous voilant à face ou “achetant" des quotas de CO2 et des droits à polluer qui ne sont que des passe droit que prenaient ceux qui le pouvaient pour louer un plus pauvre se faire tuer au front à leur place... mais par pitié ne poussez pas l'ignominie à dire que c'est là un comportement écologique et rationnel car il ne l'est pas.

jeudi 14 août 2008

Question d'euthanasie.

L'actualité nous confronte à un nouveau cas d'euthanasie. Un jeune homme atteint d'une maladie dégénérative rare et incurable à mis fin à ses jours prétextant le caractère insupportable de sa condition et, surtout, de pouvoir mettre fin à ses jours sans avoir la certitude de pouvoir le faire lorsque son état se sera aggravé.

Il y a dans cet acte une chose insupportable et insoutenable: celle de voir quelqu'un de lucide comprendre qu'il pourrait encore vivre mais qui sait également que bientôt il ne pourra plus maîtriser le court de son existence et la subir comme enfermé dans une voiture dont les portières seraient closes, les câbles de freins rompus dans une pente sans issue.

Tout comme les derniers cas récents, ce jeune homme avait fait une demande officielle de pouvoir mettre fin volontairement à ses souffrances dans un cadre légal. Cela montre également le niveau de réflexion et de lucidité de la part des personnes dans cette situation.

Monsieur le président a répondu par une fin de nom recevoir arguant des convictions philosophiques personnelles allant à l'encontre de la libre détermination de sa propre existence. Outre que ces conceptions “philosophiques" sont suffisamment étranges pour qu'on se demandent ce qu'elles sont de précisément philosophiques (elles semblent plus ressortir de la conviction religieuse que de l'argumentation rationnelle) bien que la question reste ouverte, beaucoup d'autres questions viennent troubler cette réponse. D'une part, excusez monsieur le président, mais vos convictions philosophiques nous intéresse beaucoup moins que celle de l'État et de la société française. Que vous soyez personnellement contre l'euthanasie est une conviction qui vous est propre est qui est respectable tant qu'elle reste dans le domaine de la sphère privée. Or la question de l'euthanasie et celle soulevée par ce jeune homme est publique et non pas privée.

Mais si cela est vrai que l'euthanasie vous choque, cela signifie que vous considérez qu'une forme de téléologie gouverne la destinée des Hommes et que seul ce dessein est en droit de choisir ou non le moment et les conditions de la mort. Vision très proche de celle avancée par le Vatican. Cela est défendable, mais il faut alors pousser le raisonnement dans ses retranchements et conclure que l'individu n'est ni libre de ses choix ni de sa destinée, que les choses adviennent car elles sont écrites et régies par un scénario pré-écrit. Comment ce déterminisme peut-il être défendu en même tant qu'un libéralisme débridé? Comment prôner l'autonomie et l'auto-détermination et soutenir en même temps une idée de finalité et de prédestination? Je serais curieux, monsieur le président, de connaître la subtilité de l'argumentation d'une telle position.

Si au contraire le libéralisme reconnaît la possibilité à chacun de faire ce qu'il souhaite dans la mesure de ses capacités, alors il faut reconnaître à l'individu la gestion totale de sa propre existence, et ceci inclue le suicide et au besoin assisté.

Quel serait le risque de permettre l'euthanasie dans un cadre légale et réglementé? Que tout le monde voudrait soudainement en finir avec la vie et demander à des médecins de les achevés? Vous savez vous-mêmes que cela est absurde, à moins que le suicide soit interdit ou que son interdiction fasse baisser le taux de mortalité volontaire. Vous savez mieux que moi que ce n'est pas le cas.

Remarquez également que les personnes ayant amené sur la place publique le débat et qui ont mis leurs actes à exécutions sont des personnes sensées et lucides qui justifient et argumentent leur acte de manière rationnelle et positive. Elles sont passées à l'acte alors qu'elles pouvaient encore le faire sachant, cela prouve une maturation extraordinaire de leur plan. C'est un hymne à la vie positive qu'elles chantent par leur attitude et non pas un massacre et un désarroi. Je suis persuadé que si une fée leur proposait entre la mort immédiate ou bien une réminiscence immédiate que leur choix serait rapide et catégorique.

Le plus étonnant dans ces tristes affaires et que l'opinion publique semble comprendre cela et respecter ces choix, mais que pour une raison toute aussi froide et calculatrice de peur de perdre des élections, le pouvoir et ses responsables semblent encore frileux pour accorder la France avec les français.

Monsieur le président, je ne vous demande ni de renoncer à vos convictions personnelle ni de signer un blanc passé à l'euthanasie, mais je demande un vrai débat, rationnel et construit de sorte que l'on puisse savoir si l'on accorde ou non la dignité aux individus ou bien si l'on considère qu'elle ne revient qu'à des cellules biologiques.

N'oubliez pas, monsieur le président, que vous vous êtes dit libéral pendant votre campagne, et qu'il faut rendre hommage à ceux qui souffrent mais qui dans leurs souffrances cherchent à rendre la vie un peu meilleure à ceux qui viendront à souffrir.

samedi 26 juillet 2008

Bonus Malus: l'écologie en question.

Le bonus malus a été mis en place par le gouvernement pour incité le consommateur à acheter des véhicules moins polluants en les favorisant à l'achat et en pénalisant les autres par une taxe. Cette méthode s'est avérée très efficace pour modifier le comportement des usagers et des consommateurs mais très périlleuse économiquement, ce qui a forcé le gouvernement à revoir sa copie et a étendre la taxe non seulement à l'achat mais à la durée de vie du véhicule.

Le gouvernement veut maintenant étendre cette pratique à d'autres produits, en particulier au logement.

Le parc de logement en France est assez ancien et souffre d'un manque criant d'isolation. Certaines études affirment que plus de la moitié des habitations seraient ainsi énergiphage. L'exécutif entend donc obligé les propriétaires à indiquer le bilant énergétique réel du logement lorsque celui-ci est proposé à la vente ou à la location et étudie la possibilité d'une taxe à la consommation pour les plus gourmands.

L'idée est belle est louable, mais elle ne correspond pas tout à fait à la réalité du terrain. D'une part le parc d'habitation est très déséquilibré dans sa répartition et son accès. Il ne faudrait pas oublier qu'en France en 2008 des personnes dorment dans le rue, et lorsque je parle de personnes je parles de centaines de personne rien à qu'à Paris. C'est un problème qu'il faut régler avant et indépendamment de la question de l'énergie ou bien avec la question de l'énergie, ce qui serait encore mieux mais beaucoup plus coûteux et compliqué que ne l'est le problème actuellement et qui n'est toujours pas réglé.

Ensuite, le parc immobilier n'est pas aussi flexible que le sont les produits industriels et manufacturés. Il est toujours possible d'arrêter ou de diminuer la production d'une voiture très polluante au profit d'une autre moins gourmande en restructurant la chaîne de production sans trop de difficulté et assez rapidement. Et s'il est possible d'imposer des normes plus strictes à la construction de nouveaux logements, il est très difficile de le faire pour ceux déjà existants.

Qui va payer cette taxe? Le locataire ou l'acheteur? Mais si cette taxe s'ajoute au prix cela ne rendra que plus difficile encore l'accès au logement, sans compter que cela se passe dans un contexte où les banques réduisent d'accès aux emprunts pour cause de difficultés de financement dans le domaine. Le risque est donc de gelé le problème plutôt que de le résoudre.

Si c'est au propriétaire de payer alors ou bien ce surcoût sera répercuté sur le prix et ramènera à la première possibilité ou bien certains propriétaires préféreront ne pas prendre le risque de la réfection et gèleront leur parc en attendant de le vendre en l'état pour une reconstruction ou un propriétaire plus fortuné. Un parc à deux vitesse risque donc de se mettre en place entre des nouveaux logements ou des logements refaits et plus chers et un parc plus ancien et mis en jachère. D'autant plus que le problème perdurera car des logements mal isolé continuent à polluer même non occupés en faisant des ponts et des trous thermiques.

Pour être efficace une telle mesure doit être radicale et se coupler à un vrai droit opposable au logement et à une taxation très importante sur les logements vides et vacants. Mais la contre partie évidemment et de se mettre à dos une série de spéculateurs, en particulier de banques, ce que les autorités rechigneront sans doute à faire.

L'idée en l'état d'un système de bonus malus pour le logement ne renforcera que les inégalités dans le domaine et accentuera la paupérisation et la précarité d'une classe moyenne jusque là encore épargnée mais fragilisée.

Ce qu'il faut c'est une politique forte de reconstruction totale du parc immobilier en France avec un plan de répartition de la consommation énergétique par capitalisation et mise en commun: développer le chauffage collectif, limiter les ponts thermiques, favoriser l'inertie de chaleur etc. dans des formes d'habitation où l'usage collectif des biens et des transports soient optimal. Cet notre mode de vie dans notre entier qu'il faut revoir, sinon cela ne sera qu'une mesurette qui intenable dans la durée se retournera contre nous.

L'écologie c'est bien mais il faut la penser de manière réaliste sans oublier que ce sont nos interactions avec l'environnement qu'il faut modifier et non pas nous ou l'environnement. Mais nous sommes parties de l'environnement, et ce sont par conséquent également les interactions inter-humaines qu'il faut revoir et optimiser.

En ce sens les SDF sont une pollution de notre système social et au lieux de vouloir les passer par dessus bord comme certains le préconisent, c'est le système entier qu'il faut ajuster pour que ce genre de situation n'arrive pas et plus. Or à ce jour la problématique de l'environnement ne couvre pas ces questions là et c'est en ce sens que les réponses apportées ne marcheront pas plus que les précédentes.